Migraine : de nouveaux médicaments préventifs redonnent de l’espoir aux malades
Pour la première fois, des traitements spécifiques à base d’anticorps monoclonaux anti-CGRP arrivent sur le marché, et visent à prévenir les crises de cette maladie chronique. Des biothérapies efficaces en particulier chez les patients en impasse thérapeutique. Mais leur remboursement n’est pas acquis.
J’ai repris le cours de ma vie. C’est comme si on m’avait enlevé un manteau de plomb, capuche comprise, raconte Stéphanie. Sept mois après le début de son nouveau traitement, sous forme d’une injection mensuelle, cette femme de 48 ans, secrétaire médicale dans un hôpital niçois, n’en revient toujours pas. Elle qui avait jusqu’à vingt-huit jours de migraine par mois est passée à moins de cinq. Et bien moins fortes. Elle est même restée deux mois sans faire aucune crise, ce qui ne lui était pas arrivé depuis dix ans.
Voilà plus de vingt ans que toute son existence était rythmée par cette ennemie opportuniste, une broyeuse de crâne surgissant à la moindre occasion : stress, manque de sommeil, foule, repas trop tardif… J’ai traumatisé ma fille quand elle était petite, elle croyait que j’allais mourir , assure Stéphanie. Au fil des années, son neurologue, Michel Lanteri-Minet (CHU de Nice), un des spécialistes français de cette maladie, lui a prescrit presque toute la palette des traitements de crises et de fond disponibles. Avec des résultats qui ne duraient pas (« j’avais juste le temps de goûter au bonheur et ça repartait », dit-elle), des effets indésirables parfois pénibles. Son quotidien était calculé au millimètre pour essayer d’éviter les crises. Mais souvent, elle a fini aux urgences, avec des perfusions d’antalgiques. Elle a fait un burn-out puis une dépression, qui a nécessité un aménagement de poste. Depuis 2016, elle travaille à mi-temps.
En juin 2019, elle a commencé des injections mensuelles sous-cutanées d’Aimovig (erenumab, laboratoire Novartis), dans le cadre d’un programme compassionnel. Ce premier représentant d’une nouvelle famille thérapeutique, les anticorps monoclonaux anti-CGRP (peptide lié au gène de la calcitonine), a obtenu une autorisation de mise sur le marché aux Etats-Unis puis en Europe en 2018, mais n’est pas encore disponible en France. Son prix est toujours en discussion. Pour Stéphanie, les résultats ont été quasi immédiats. Même l’hypersensibilité au niveau de la face et du crâne qui persistait entre ses crises a disparu. Le protocole dont elle bénéficie, prévu pour durer un an, doit s’arrêter en juin. Sa hantise ? Ne plus alors avoir accès à l’Aimovig, si celui-ci n’est toujours pas commercialisé en France, ou s’il n’est pas pris en charge, comme en Angleterre. Pour anticiper un coût de l’ordre de 600 à 1 000 euros par injection, cette secrétaire médicale a commencé à mettre de l’argent de côté. Sa fille a même ouvert une cagnotte Leetchi. Un cas extrême mais emblématique de l’enfer quotidien que vivent certains migraineux, et des effets parfois spectaculaires qu’obtiennent ces nouveaux traitements.