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samedi 3 octobre 2020

Le safran

 Safran

Son nom

Chacun a peut-être sa petite idée de l'« austérité joyeuse », concept créé par notre incontournable écologiste Pierre Dansereau pour essayer de nous rentrer gentiment dans la cervelle qu'on devrait dépenser moins et conserver plus. Celle de mon copain Christian, éleveur dans l'âme, c'est, même s'il n'a pas de quoi acheter des cadeaux à ses proches pour Noël, de pouvoir leur offrir du foie gras provenant des canards qu'il aura lui-même élevés. Pour la jardinière que je suis, ce serait plutôt de leur offrir un sachet de safran que j'aurai cultivé dans mon jardin.

Cueillis péniblement à la main, les stigmates (ou extrémités supérieures du pistil) du safran constituent l'épice la plus chère du monde. À raison de trois stigmates par fleur, il faut 150 000 fleurs pour faire un kilo et près de cinq kilos frais pour faire un kilo séché. De ce fait, par le passé, le safran était souvent falsifié, notamment avec de la fleur de carthame, proche parente en couleur. Pour savoir si le marchand vous avait volé, on recommandait de plonger la main dans le sac. Si les stigmates restaient collés aux doigts, il y avait falsification, une offense, soit dit en passant, qui était punie de mort. Vraiment pas de quoi rigoler.

Et pourtant, le safran, c'est un simple crocus, tout aussi anodin que ceux qui se pointent le nez dans nos parterres très tôt au printemps. Plus précisément, il s'agit du Crocus sativus, nom qui vient du grec krokos, lequel signifie... safran. Bref, le safran, c'est l'ultime crocus. Le nom français (de même que l'anglais) est emprunté à l'arabo-persan za'faran, ce qui n'est pas étonnant quand on sait que les Arabes ont détenu pendant longtemps le monopole absolu du commerce des épices et qu'ils ont, par conséquent, exercé une influence déterminante sur leur nomenclature.

Ajoutons que le safran a jadis donné son nom à des préparations médicinales qui n'avaient rien à voir avec lui. Ainsi ce « safran de Mars apéritif », qui était en fait de l'hydroxyde de fer, ou ce « safran de Mars à la Rosée », cette fois de la limaille de fer exposée à la rosée...

Et ça se mange?

Évidemment!

Il paraît qu'on l'utilisait déjà en cuisine du temps du roi Salomon, c'est-à-dire il y a à peu près trois mille ans. On l'a employé comme colorant pour les confiseries et encore aujourd'hui, au souper de Noël, les Scandinaves mangent un type de gâteau assaisonné de safran.

Toutefois, c'est avec le poisson qu'il s'entend le mieux. On le connaît dans la paella et la bouillabaisse ainsi que dans leurs variations régionales, la bourride, par exemple, que l'on sert avec un ailloli. On l'emploie également dans certains risottos, dont le traditionnel risotto à la milanaise, dont vous trouverez la recette dans Documents associés.

Et ça soigne quoi?

On disait jadis que le safran apportait la gaieté. Pour les Orientaux, il est symbole de sagesse; c'est la raison pour laquelle les vêtements des moines bouddhistes sont de cette couleur.

On l'a employé pour soigner l'hystérie, soit seul, soit en conjonction avec de l'opium. Bon régulateur des règles, il soulage les douleurs menstruelles ainsi que les douleurs lombaires qui les accompagnent. C'est, paraît-il, un aphrodisiaque. En outre, il se comporte à la fois comme un sédatif et un tonique, pour l'estomac comme pour le système nerveux central. En usage externe, c'est un analgésique de la muqueuse des gencives et on l'emploie contre les troubles de la dentition.

On le prépare en infusion à raison de 15 g par litre d'eau. Amener à ébullition et infuser 15 minutes. Prendre 1 à 3 tasses par jour. On peut également préparer une teinture qu'on prendra toutes les deux heures à raison de 10 à 20 gouttes. Par voie externe, on emploiera la teinture en friction sur les gencives douloureuses.

La rumeur qui circule dans certains milieux à l'effet que le safran serait toxique à des doses relativement faibles a été récemment démentie par un chercheur1 qui étudie les propriétés chimiopréventives de cette épice et affirme qu'un adulte devrait en consommer plusieurs centaines de grammes avant d'éprouver le moindre désagrément. On pense que cette erreur vient d'une confusion entre le safran et un autre crocus, le colchique des prés, qui lui est botaniquement très proche et qui est très toxique, même à petites doses.

Son mode de culture

D'humeur accommodante, le safran se cultive facilement, comme les autres crocus. Toutefois, comme il est sensible au froid (il a besoin d'une zone 6 pour survivre), il faut, dans nos régions, récolter le bulbe à l'automne (après la floraison) et le conserver au frais pendant l'hiver, soit en cave froide, soit au réfrigérateur dans un sac de plastique perforé. On le plantera au plus tard début mai au soleil ou à mi-ombre, dans une terre bien drainée et dans un endroit protégé des vents. Comme les bulbes sont assez chers, commencez par une douzaine (10 $). D'année en année, ils se multiplieront. Sachez que les bulbes ne sont offerts qu'à l'automne. Dès que vous les aurez reçus, mettez-les en cave ou au réfrigérateur.

Mais, dès l'automne, il faut préparer la terre en l'ameublissant bien. Pratiquez des trous de 15 cm de profondeur, espacés de 15 cm également, et placez-y des bâtonnets qui resteront en place tout l'hiver. Tôt au printemps, retirez-les, déposez les bulbes au fond des trous et recouvrez-les de terre noire ou de compost.

Vous pouvez essayer d'élever le safran en contenant, mais il ne donnera pas autant qu'en pleine terre. Utilisez un terreau riche que vous renouvellerez chaque année. L'hiver, arrêtez complètement l'arrosage et conservez en caveau ou encore essayez de le garder au jardin, dans un endroit abrité, contre un bâtiment par exemple, protégé d'un épais manteau de paille ou de feuilles mortes.

Pour le récolter, sectionnez les pistils avec les doigts ou prélevez-les avec une pince à sourcils et faites-les sécher sur une feuille de papier ciré (si vous les placez directement sur une toile moustiquaire, ils risquent d'y coller) à l'ombre. Mettez-les dans un contenant hermétique dès qu'ils sont secs.

À noter que seul le pistil est orangé. La couleur de la fleur elle-même, qui apparaît à l'automne quand la température fraîchit, va du lilas au pourpre.


La ronce

 La ronce

Son nom

En France comme au Québec, il existe une certaine confusion de nom entre le véritable mûrier, un arbre du genre Morus, et la ronce ou mûrier sauvage, morphologiquement très différente et d'un tout autre genre botanique (Rubus). Cette confusion vient de la similitude des fruits que produisent le mûrier et la ronce. Dans certaines régions de France, pour les différencier, on nomme « mûron » le fruit de la ronce et « mûre » celui du mûrier.

« Ronce » viendrait de rumex, rumicis, qui, en latin classique, signifiait « dard ».

Rubus est un nom classique ancien, dérivé de ruber, « rouge », par allusion à la couleur du fruit de certaines espèces.

Les divers noms anglais - raspberry, blackberry, cloudberry, dewberry, salmonberry, nagoonberry, thimbleberry - témoignent de la difficulté à caractériser ce genre botanique qui serait en pleine explosion génétique.

Il n'y a pas à proprement parler de différences entre la ronce et le framboisier. D'un point de vue botanique, ce sont tous deux des Rubus et leur seule différence consiste en ce que, dans le cas des framboisiers, le fruit se sépare du réceptacle lorsqu'il tombe tandis que, dans le cas des mûriers, ce n'est pas le cas. Histoire de nous compliquer la tâche, on a créé un sous-genre pour ces derniers, auquel on a donné le nom d'Eubatus. Mais, botaniquement parlant, un sous-genre, ça ne veut pas dire grand-chose et quand d'aventure on en crée, personne ne sait jamais trop quoi en faire ni où les placer exactement dans la hiérarchie habituelle.

Leur rôle dans l'équilibre écologique

« Les Rubus par leur multitude et leur mode de vie, écrit le frère Marie-Victorin, jouent dans la nature un rôle écologique défini. Ils apparaissent sur les terrains sablonneux dénudés, après les graminées et les carex, et fournissent une protection efficace au sol durant l'ensemencement par les arbres. Le règne des Rubus est toujours éphémère, et bientôt ces végétaux passent à l'état d'éléments accessoires. »

Entre-temps, ils auront servi de nourriture aux oiseaux de toutes espèces, leur fournissant les hydrates de carbone nécessaires pour affronter l'hiver ou la grande migration vers le sud, ainsi qu'aux cerfs et, surtout, aux ours. D'ailleurs, à l'automne, les excréments d'ours - excusez l'image - sont reconnaissables entre tous à cause de la multitude de petites graines non digérées qui les garnissent. Quant aux excréments d'oiseaux - décidément, on tombe dans la scatologie - à cette époque de l'année, ils sont littéralement bleus foncé ou pourpre.

Et ça se mange?

On ne va pas s'étendre sur les propriétés gustatives des fruits de la ronce, n'est-ce pas? Disons simplement qu'ils sont consommés depuis toujours, notamment par les Amérindiens qui en récoltaient et en récoltent toujours de très grandes quantités. Pour les préserver, ils les ramassaient immatures et les conservaient dans des caches sous terre. Plus au nord, on les gardait dans des sacs de peau de phoque ou dans de la graisse de phoque ou de poisson-chandelle. On les faisait parfois cuire, puis on les écrasait et on les faisait sécher en une sorte de pâte de fruits. Suffisait de casser un morceau au besoin et de l'ajouter au plat du jour. Ou bien on les faisait sécher tels quels pour les utiliser plus tard dans les sauces, les puddings ou la pâte à pain. On en faisait de la « crème glacée » en les fouettant avec de la graisse de phoque, on les marinait avec des feuilles de patience (une plante proche de l'oseille, qui appartient au même genre botanique), on les mélangeait avec d'autres baies comestibles ou avec du sucre d'érable, ou encore, on en faisait du jus que l'on consommait sur-le-champ, car il ne se conservait guère. Évidemment, on peut en faire des tartes, des gelées, des confitures, des sirops, du vin, du vinaigre (le célèbre vinaigre de framboise) et d'excellentes liqueurs.

On a aussi consommé les jeunes pousses de l'année, appelées d'ailleurs turions, tout comme les pousses de l'asperge. On les pelait soigneusement, puis on les mangeait crues ou on les faisait cuire comme légume pour accompagner le gibier. On peut facilement en faire des conserves pour l'hiver, ou des marinades.

Les Amérindiens fabriquaient une sorte de bière en faisant bouillir ensemble les tiges et les fruits, puis en ajoutant de la levure et du sucre et en laissant fermenter le tout quelques jours.

Les pétales des fleurs de toutes les espèces sont comestibles et peuvent être ajoutés aux salades de fruits ou de légumes. Mais Dieu qu'ils sont petits! Et, en plus, au moment de leur cueillette, on se trouve en concurrence directe avec tout ce qui porte aiguillon à venin et autres sympathiques attributs du même genre.

Les feuilles constituent une excellente infusion et on les a souvent substituées au thé, trop cher ou trop rare. Riches en tanin, elles possèdent l'astringence que l'on recherche dans cette boisson. En Chine et en Europe, il était d'usage de les faire fermenter légèrement dans le but d'en accroître la saveur, tout comme on le fait pour produire le thé noir. La technique est simple : il suffit de laisser flétrir les feuilles à l'ombre dans un endroit humide où la température oscille entre 25 et 40o C en les empilant en couches bien tassées d'une dizaine de centimètres. Au bout de quelques heures, voire d'un jour ou deux, selon l'intensité que l'on recherche et la température ambiante, elles auront pris une couleur foncée. On les fera alors sécher à l'air libre dans un endroit sec, en veillant à bien les détacher les unes des autres. Comme pour le thé, on peut s'en servir pour fumer du poisson, de la viande ou des légumes.

En Europe, le « thé des familles » faisait partie de la tradition. Composé de mélanges de plantes dont la recette variait d'une région à l'autre, voire d'une chaumière à l'autre, il comprenait presque invariablement des feuilles de ronce, de cassis, de framboisier et de fraisier en proportions variables. À cela, on ajoutait au gré de l'humeur ou de la saison, des feuilles de menthe poivrée, des fleurs de tilleul, du serpolet, etc. Très souvent, les feuilles de toutes ces plantes étaient préalablement mises à fermenter. Une fois séchées, on préparait le mélange familial que l'on conservait dans des boîtes en fer blanc.

Les feuilles de Rubus peuvent servir à clarifier le vin.

Très rarement entend-on dire que les bourgeons sont comestibles. Et pourtant, ils sont absolument délicieux, crus, ajoutés à une salade de fruits. Ils ont une saveur complexe, à la fois fruitée et tanisée qui rehaussera un plat un peu fade. Il est vrai qu'il faut beaucoup de temps pour les ramasser, si bien qu'on préfère généralement les réserver aux emplois médicinaux.

Et ça soigne quoi?

Dans la phytothérapie française, on fait une différence entre le framboisier et le mûrier sauvage, mais quand on y regarde de près, on se rend compte que leurs propriétés se recoupent largement. Ainsi, ces deux plantes sont astringentes et diurétiques et leurs feuilles ont été employées indifféremment pour soigner divers troubles menstruels ainsi que les irritations de la bouche et de la gorge. Toutefois, la ronce est censée être légèrement constipante tandis que le framboisier serait plutôt laxatif, ce qui étonne vu sa teneur en tanin. De plus, la tradition a établi un certain nombre d'indications spécifiques à chacune des deux plantes. Ainsi, c'est la feuille du framboisier rouge (R. idaeus) que l'on recommande aux femmes enceintes pour tonifier leur utérus et les préparer à l'accouchement, tandis que c'est la feuille de mûrier sauvage (R. caesius) qui est réputée utile aux diabétiques.

Aucune espèce quelle qu'elle soit n'est toxique, dangereuse, dommageable ni ne provoque d'effets secondaires, si on exclut les blessures causées par les dards acérés placés stratégiquement sur les tiges. Aussi sera-t-on heureux d'apprendre que les feuilles, appliquées sur ces blessures, apporteront un soulagement immédiat et contribueront à en accélérer la guérison.

Chez les Iroquois et les Saulteux, les racines des ronces servaient de remède aux jeunes mères et aux femmes enceintes fatiguées. Aux États-Unis, on a employé la décoction de l'écorce de la racine de mûrier pour soigner la diarrhée. En Chine, on considère d'ailleurs que l'écorce de la racine de mûrier est beaucoup plus efficace que les autres parties de la plante et on l'utilise chaque fois que possible.

Les fruits ou leur jus ont souvent servi en médecine. Ainsi, dans la Grèce antique, on employait les mûres contre la goutte. Le jus de framboise serait efficace contre la cystite tandis que la confiture de mûres a servi à soigner le rhume et que le cordial à base de jus de mûre, de sucre, d'épices et de brandy était employé pour soigner la diarrhée ou d'autres problèmes intestinaux. En fait, les préparations culinaires à base de framboises et de mûres se doublaient très souvent d'une fonction médicale. Quant aux fruits séchés, qui sont peu intéressants pour la consommation parce qu'il ne reste pratiquement plus que les pépins, ils ont servi à faire de bienfaisantes infusions. On peut s'en servir aussi pour agrémenter une infusion insipide ou camoufler la saveur trop marquée d'une plante médicinale.

Les feuilles et les bourgeons du mûrier sauvage ont servi à soigner l'hémoptysie, les hémorroïdes, la diarrhée, la dysenterie, les oliguries et le diabète.

On l'a dit, par voie externe, les feuilles de framboisier ou de ronce peuvent soigner les blessures légères. En bain de bouche et en gargarisme, elles soignent l'angine, la gingivite, la glossite, la pharyngite, la laryngite, les névralgies dentaires, les plaies atones, propriété qu'elles doivent à leur astringence.

Quelle que soit l'espèce choisie, on prépare les feuilles par décoction, en faisant bouillir pendant deux ou trois minutes l'équivalent d'une poignée par litre d'eau. Cette décoction servira pour les usages tant externes qu'internes. Pour préparer le glycéré de bourgeons, reportez-vous à la rubrique cassis.

Il y avait jadis une pratique qui consistait à mettre dans un bocal des bourgeons de ronce fraîchement récoltés et de les exposer au soleil. Au bout de quelques jours, un suc sirupeux s'en écoulait. On le récupérait, l'étendait d'un peu d'eau et utilisait cette préparation en pansements sur les plaies ou encore en gargarisme contre les angines.


Le romarin

Le romarin 

Une légende qui vieillit bien 

Je me demande s'il existe une seule personne en ce bas monde qui n'ait jamais entendu parler de la fameuse légende de la reine de Hongrie, mais au cas où cette personne existerait, voici l'histoire. Vieille, paralytique et percluse d'arthrite, Élisabeth de Hongrie consulta un ermite, tout aussi usé qu'elle, paraît-il, mais plein de ressources, qui lui concocta un esprit de romarin pas piqué des vers et grâce auquel elle fut transformée en une délicieuse jeune femme que le roi de Pologne de l'époque - cela se passait en 1370 - s'empressa de demander en mariage. L'histoire ne dit toutefois pas à combien s'élevait la dot apportée par la dite reine... 

Bref, traditionnellement, le romarin était considéré comme la plante antivieillissement par excellence, particulièrement pour ce qui a trait aux fonctions intellectuelles. Il y a d'ailleurs un adage qui dit que le romarin est à l'esprit ce que la lavande est à l'âme. En effet, le romarin était réputé pour stimuler l'activité cérébrale et améliorer la mémoire. C'est pour cette raison que les lettrés grecs le portaient en couronne lorsqu'ils devaient se livrer à des exercices intellectuels particulièrement exigeants. 

Le médecin hygiéniste Kneipp considérait que c'était le tonique idéal pour les personnes âgées. Il recommandait de le prendre macéré dans du vin ou, encore, de prendre un bain dans lequel il avait trempé. Il a d'ailleurs servi à soigner nombre de maladies qui touchaient essentiellement les personnes âgées : faiblesse générale, surmenage physique et intellectuel, accompagné de perte de mémoire, hypotension, impuissance, divers troubles cardiaques d'origine nerveuse, vertiges, syncopes, rhumatismes, séquelles de paralysie, faiblesse des membres, hypercholestérolémie, cirrhoses, faiblesse de la vue. 

L'industrie agroalimentaire a récemment découvert les puissantes propriétés antioxydantes du romarin. La plante pourrait en effet remplacer le BHT et le BHA, deux antioxydants de synthèse utilisés pour la conservation des aliments, mais qui ont l'inconvénient de présenter un risque cancérogène. En fait, ces propriétés, on les connaissait depuis longtemps puisque, avant l'avènement du réfrigérateur, on s'en servait pour conserver la viande, mais l'odeur et la saveur fortement aromatiques de la plante ne permettaient de l'utiliser que dans quelques rares mets avec lesquels elle est compatible. Ceci a changé dans les années 90 lorsqu'on a réussi à extraire ses principes antioxydants sans son huile volatile. En théorie, on peut donc l'utiliser en remplacements des contestés et contestables BHT et BHA. En théorie seulement, puisque l'extrait n'est toujours pas approuvé par les autorités américaines ou canadiennes. 

Entretemps, consommons-le nature et, pour l'avoir bien frais et exempt de tout résidu de produits chimiques, cultivons-le. Et puis tiens, pourquoi ne pas offrir un plant à l'occasion de la fête des Pères. Avec une carte qui dirait quelque chose du genre : « Cher paternel, comme je voudrais te garder encore bien longtemps, voici un agent de conservation de premier ordre. » 
Culture 

Le romarin ayant un très faible taux de germination, il est préférable de se procurer un ou des plants en jardinerie ou dans des maisons spécialisées. Richter's (http://www.richters.com) vend une quinzaine de variétés différentes à des prix qui vont de 3 à 6 dollars. Plantez-le dans un coin ensoleillé du jardin ou dans la plate-bande de fleurs en évitant les endroits où le sol est mal drainé. Dès la première saison, il prendra une bonne envergure (je dirais environ 30 centimètres de diamètre), alors tenez-en compte. 

Le romarin n'est pas rustique sous nos climats. Même le cultivar « Arp », supposé être résistant au froid, ne survit que dans les zones 6 et plus (le sud du Québec se trouve en zone 4b - 5), et encore, avec une bonne protection d'hiver. Il pourra peut-être survivre à des hivers particulièrement doux si on le protège adéquatement, mais rien n'est moins garanti. Dans tous les cas, procédez ainsi: à l'automne, taillez les tiges environ de moitié. Paillez le plant de façon à l'enterrer entièrement et recouvrez-le d'une toile de jute. 

La meilleure chose à faire, c'est peut-être d'empoter le plant avant les gelées d'automne et de le garder à l'intérieur dans un endroit relativement frais. La déshydratation étant son pire ennemi (n'oublions pas que dans son milieu naturel, il est constamment exposé aux embruns de la mer), il faut éviter de le mettre à proximité d'une source de chaleur ou de le placer devant une fenêtre exposée au sud. D'un autre côté, il ne doit pas avoir les pieds dans l'eau, au risque de pourrir par la racine. On recommande donc de placer le pot sur un plateau contenant du gravier ou de l'argile expansée et rempli d'eau à mi-hauteur ou encore de vaporiser ses feuilles un jour sur deux. La variété « Blue Boy » serait particulièrement adaptée à la culture en pot à l'intérieur. Il faut éviter de le fertiliser durant l'hiver. Attendez de le transplanter en pleine terre au printemps suivant pour lui mettre un peu de compost et, si la terre est acide, une poignée de chaux. 

Et si, malgré tous ces conseils, vous perdez votre romarin, et bien sachez que c'est parce que vous n'êtes tout simplement pas assez vertueux. En effet, d'après un autre adage, la plante ne tolère que la compagnie des êtres de très grande vertu. 
Essayez le romarin dans... 

Tout ce qui est pâte à pain, à fougasse, à pizza. 

La gelée de pomme. 

Les plats de viandes rôties, particulièrement l'agneau et le porc, ou insérez quelques tiges dans la cavité des volailles que vous avez l'intention de cuire au four. 

Les marinades pour viandes braisées ou pour brochettes. 

L'huile d'olive, que vous préparerez ainsi : remplissez un bocal de verre de branches de romarin, recouvrez d'une bonne huile d'olive pressée à froid, laissez macérer au soleil deux semaines, filtrez en exprimant et conservez au frais dans un flacon opaque; arrosez une tranche de pain, des pommes de terre bouillies ou des légumes cuits d'un filet de cette puissante huile aromatique. 

Le vin : faites macérer une poignée de tiges dans 2 litres de vin blanc pendant quelques jours, puis filtrez. 

Les herbes de Provence : une partie de chacune des herbes suivantes, séchées : sarriette, marjolaine, origan, romarin; 4 parties de thym séché; mélangez intimement les herbes et conservez-les dans un flacon de verre ou de céramique. 

Une infusion : deux cuillerées à thé de feuilles ou de fleurs par tasse d'eau bouillante. Infusez 10 minutes. Prenez une tasse avant ou après les repas. 

Un bain : à prendre de préférence le matin, car il est stimulant. La dose est de 500 grammes pour les adultes et 250 grammes pour les enfants. 
Le truc du cuistot 


Débarrassez les tiges de leurs feuilles, en ne gardant qu'une petite touffe au sommet, et utilisez-les pour les brochettes. Ou jetez des feuilles sur le gril du barbecue lors de la cuisson. 

La potentille

La potentille

Son nom

Potentilla vient de potens, qui, ce n'est pas trop difficile à deviner, veut dire « puissant », par allusion aux propriétés médicinales de certaines espèces. Anserina veut dire « qui appartient à l'oie », par allusion au fait, selon les uns, que ces palmipèdes raffolent de la plante ou, selon les autres, que sa feuille ressemble à la patte de l'oie. « Tormentille » vient du latin tormentum « tourment », parce que cette espèce était réputée pour soulager les maux de dents. Erecta, ou recta, veut dire « dressée », par opposition à « rampante » (comme dans P. reptans)

Et ça se mange?

- Ouais.

- Mais encore?

- Pardon?

- Vous dites que ça se mange, mais vous n'avez pas dit comment on la mangeait.

- J'ai dit que ça se mangeait, moi?

- Mais bien sûr, vous venez de le dire, là.

- Je dis vraiment n'importe quoi.

- Vous ne respectez pas votre contrat.

- Bon, d'accord.

À vrai dire, l'ansérine se mange, mais pas la tormentille; et c'est pour cela que je suis un peu embêtée. Ce n'est même pas tout à fait ça. La tormentille pourrait techniquement se manger aussi, mais étant donné sa forte astringence, il faudrait la cuire dans plusieurs eaux pour la débarrasser de son tannin. Si l'ansérine est meilleure, c'est qu'elle renferme moins de tannin. Quant aux autres potentilles, théoriquement, elles devraient pouvoir se consommer aussi, mais les ethnobotanistes restent muets à ce sujet.

Il semble que les Amérindiens de l'ouest du Canada raffolaient littéralement de la potentille ansérine, qui constituait un aliment de base - un peu comme les pommes de terre pour nous - et était récoltée en très grandes quantités. Mangées fraîches ou bien séchées en prévision de l'hiver, les racines servaient, en outre, de monnaie d'échange pour des denrées qu'on trouvait plus rarement dans la région. Des familles s'attribuaient les parcelles où elle abondait, parcelles qu'elles se transmettaient de génération en génération comme s'il s'agissait d'un patrimoine familial extrêmement précieux. On attachait les racines en bottes que l'on faisait ensuite cuire à la vapeur, dans un panier ou, si on disposait de grandes quantités, dans une fosse. On les mangeait assaisonnées d'huile de poisson-chandelle (oui, oui, ce poisson servait vraiment de torche aux Indiens), en accompagnement de viande, poisson ou canard. Les racines étaient également consommées aux Hébrides, bouillies ou rôties, pour leur saveur qui rappelle vaguement celle du panais. Et comme c'est précisément le temps de manger les panais (et les salsifis) que quelques bonnes gelées rendent plus doux, notre recette, que vous trouverez dans Documents associés, vous permettra de comparer les saveurs.

Et ça soigne quoi?

- Est-ce que je sais moi?

- Bon, là ça commence à bien faire. Vous êtes censée faire une chronique complète, sans qu'on vous « torde le bras » à chaque étape.

- Soit. Vous l'aurez voulu.

Le problème, c'est que je ne sais pas si l'espèce P. recta, qui pousse chez nous et qui est naturalisée d'Europe, correspond à l'espèce P. erecta qui pousse en Europe et dont le nom a récemment remplacé celui de P. tormentilla, qui désignait l'espèce censée posséder les plus puissantes propriétés médicinales. Et pour nous compliquer davantage l'existence, la P. reptans, qui est également naturalisée d'Europe, a également porté le nom de P. tormentilla et de Tormentilla erecta, ce qui signifierait qu'elle aurait aussi des propriétés médicinales. Mais on l'a aussi appelée « potentille de Norvège » sauf que, selon les botanistes modernes, la potentille de Norvège n'est pas la P. reptans, puisqu'il s'agit de la Potentilla norvegica. Qui plus est, la P. simplex, qui serait une simple variation sur le thème de P. reptans, aurait également de puissantes propriétés médicinales, sauf que, à ma connaissance, il n'y a que les soeurs de la Providence pour en avoir parlé. Et c'était en 1890.

Alors, vous comprenez mon problème? C'est la vraie pagaille là-dedans et ce n'est pas parce que les soeurs de la Providence nous disent que toutes les potentilles ont les mêmes propriétés qu'on doit les croire sur parole, n'est-ce pas?

Par contre, puisque c'est l'acide tannique qui semble être le principe actif de la potentille, on peut vraisemblablement conclure que plus la racine est astringente (à cause de son tannin), plus elle est efficace médicinalement. Comme aucune des potentilles n'est poison, on ne risque rien à essayer les diverses espèces qui poussent à l'état sauvage sous nos climats. Il suffit de goûter. Moins c'est mangeable, plus c'est efficace. Simple, non?

- Simple, oui, mais pas très scientifique, je dirais.

- Pour la science, vous frappez à la porte d'à côté, d'accord? Non mais, ho! vous me prenez pour qui?

À cause de leur astringence, les potentilles sont particulièrement utiles tant à l'intérieur - pour soigner la diarrhée - qu'à l'extérieur - pour soigner les affections des muqueuses de la bouche et de la gorge.

Dans le cas de la diarrhée, elles viendraient à bout de l'entérocolite, de la diarrhée estivale ainsi que de celle qui accompagne la typhoïde. Elles sont également efficaces contre l'entérite et la colite aiguës et subaiguës. On peut les prendre sous forme de poudre (racine séchée et finement réduite en poudre) à raison d'une pincée, plusieurs fois par jour; de tisane à raison de 1 à 3 cuillerées à soupe de rhizomes coupés en morceaux à faire bouillir 15 minutes dans 1/2 litre d'eau. Prendre une tasse plusieurs fois par jour. Le vin de tormentille serait particulièrement efficace. On le prépare en faisant macérer pendant une semaine 70 g de racines bien nettoyées dans un litre de porto ou de brandy. Filtrer, boire 1 à 3 verres à bordeaux (l'équivalent de 75 ml par verre) par jour.

Par voie externe, on se sert de la décoction en gargarisme pour soigner les aphtes et autres ulcérations de la bouche, en injections vaginales pour soigner les leucorrhées et en compresses pour soigner les contusions, les ecchymoses et les brûlures. La stomatite et la gingivite persistantes ainsi que la pharyngite chronique - y compris la toux des fumeurs - seraient soulagées par des gargarismes à la racine de tormentille. On a également soigné la stomatite et la périodontose en utilisant un mélange à parts égales de teinture de tormentille et de teinture d'arnica ou de teinture de tormentille et de teinture de myrrhe qu'on applique sur les gencives ou la gorge avec un pinceau ou le doigt. Enfin, on a soigné avec grande efficacité, semble-t-il, les engelures en diluant un extrait de tormentille dans de la glycérine et en appliquant la préparation sur la partie atteinte.

La potentille ansérine a été longtemps employée en médecine, mais on croit aujourd'hui que sa réputation était surfaite, probablement à cause de sa faible teneur en tannin. Ce sont les feuilles et les fleurs qu'on a employées. On a dit d'elle que c'était l'amie du sexe féminin à cause de ses propriétés stimulantes et antispasmodiques de l'utérus. On s'en est servi pour soigner la diarrhée, l'hémoptysie, les règles douloureuses, les crampes d'estomac, l'angine de poitrine, les convulsions et l'incontinence urinaire. Mâcher régulièrement sa racine était censé raffermir les gencives.


Le plantain

 Le plantain

Son nom

« Pied de l'homme blanc », disaient les Amérindiens pour désigner le plantain qui serait arrivé en Amérique avec les colons français et anglais, ses semences voyageant clandestinement sur les semelles de leurs chaussures, et se serait implanté dans les chemins qu'ils empruntaient.

Le nom latin Plantago signifierait « plante qui agit », par allusion aux propriétés médicinales que les Romains lui attribuaient. D'autres avancent que le nom signifie plutôt « plante des pieds » par référence à la forme des feuilles de certaines espèces.

Il existe plus de 200 espèces de plantain, et le genre est répandu un peu partout sur la planète. C'est à ce même genre qu'appartient le Plantago psyllium, dont les graines légèrement laxatives sont vendues en pharmacie. Les espèces qui nous intéressent ici sont le Plantago major (grand ou majeur), le Plantago media (moyen) et le Plantago lanceolata (petit ou lancéolé), auxquelles on attribue les mêmes propriétés médicinales, bien que le plantain majeur (Plantago major) soit, de loin, le plus fréquemment employé.

Son rôle dans l'équilibre écologique

Selon le frère Marie-Victorin, « le plantain majeur est la nourriture favorite de la chenille rousse et noire que l'on voit, à l'automne, marcher vivement le long des chemins. Cette chenille est la larve d'un lépidoptère, l'Isia isabella. »

Et ça se mange?

On a mangé les jeunes feuilles crues, ajoutées aux salades. Leur goût rappelle vaguement celui de champignons auxquels on aurait ajouté une pointe d'oseille. Plus coriaces en vieillissant, elles sont meilleures cuites à la manière des épinards. On a également mangé les graines, réduites en farine et ajoutées à la pâte à pain ou à la soupe. À noter qu'elles constituent un excellent aliment pour les oiseaux en cage, et, on peut le supposer, pour nos oiseaux indigènes. Cueillez-en et mettez-les dans la mangeoire l'hiver prochain.

Malgré l'abondance de la plante en Amérique du Nord, les Amérindiens ne semblent pas l'avoir beaucoup employée en cuisine. On sait que les Tanaina ainsi que d'autres groupes indigènes de l'Alaska ont consommé les jeunes feuilles du Plantago maritima et du Plantago macrocarpa qu'ils mangeaient crues ou cuites, souvent mélangées à de la graisse de poisson ou de phoque et que, encore aujourd'hui, ils en font des conserves. Toutefois, on croit que ces emplois sont relativement récents. D'ailleurs, les Tainaina n'ont pas de nom pour cette plante.

Et ça soigne quoi?

Par voie interne, on dit que le plantain est un excellent purificateur du sang, des poumons et de l'estomac. Il soignerait l'hémophilie, la diarrhée, la dysenterie, les retards dans le développement chez l'enfant, la tuberculose, les bronchites chroniques, la pharyngite, la laryngite, les néphrites. Les graines ont été employées avec succès dans les hémorragies utérines et celles du poumon. De leur côté, les Chinois emploient ces dernières pour leurs propriétés diurétiques et éliminatrices de l'urée, de l'acide urique et des chlorures - les déchets de l'organisme, quoi! En outre, parce que les graines sont tellement nombreuses, ils les considéraient comme un symbole de fertilité et croyaient que leur cueillette favorisait les grossesses. On dit aussi qu'ils s'en servaient, avec de la graine de lin, pour soigner la baisse du pouvoir sexuel chez l'homme. Mais bon, on le sait, les Chinois ont à peu près tout utilisé à cet effet.

En usage externe, on s'en est servi contre les conjonctivites, l'inflammation des paupières, les plaies, coupures, ulcères de jambe, gingivites, dartres, dermatoses croûteuses, pertes blanches. Ainsi que contre les morsures de vipères et les piqûres d'insectes. Les vipères étant rares sous nos climats, c'est contre les piqûres d'insectes qu'on l'apprécie tout particulièrement chez nous. Piqûres d'abeilles, de guêpes, de frappes-à-barres, de brûlots, de maringouins et, par temps orageux, de mouches domestiques ou de coccinelles, qui oui, peuvent vous mordre sauvagement sous l'effet de la pression atmosphérique. Pour soigner toutes ces petites blessures, il suffit de froisser quelques feuilles et de les appliquer directement sur la partie touchée. Le soulagement est quasi instantané.

On affirme, en outre, que les feuilles froissées et appliquées sur les lésions causées par l'herbe à la puce, les guérissent. « Ab-so-lu-ment! », me dit Louise, une amie, qui a récemment soigné ainsi sa petite fille de deux ans, ajoutant que, en quelques heures à peine, il n'y avait plus aucune trace de lésions. Ça tient presque du miracle quand on sait combien il est difficile de se débarrasser de cette dermatose.

Comme on avait les deux mains dedans, Louise s'est également rappelé ce conseil que sa mère lui avait donné après qu'elle se soit éraflé les genoux en chutant de sa bicyclette : « Tu prends une feuille de plantain, tu la « liches » et tu la colles sur le bobo.» Et voilà un pansement de fortune qui ne passerait peut-être pas le test de l'inspection sanitaire, mais qui est réellement efficace.

On peut préparer une infusion, à raison de 10 g de feuilles pour 100 ml d'eau, dont on boira 2 à 4 tasses par jour. Mais à cause de sa richesse en mucilage, la plante se prête mieux à la macération (tout comme la mauve et la guimauve). On fera donc bouillir une minute dans un litre d'eau 30 à 60 g de feuilles, puis on laissera macérer toute la nuit. Boire un litre en 24 heures.

L'infusion ou la macération convient également pour les usages externes, en gargarismes, bains de bouche, lavages oculaires, compresses ou irrigations vaginales, selon les indications.


Le pissenlit

 Le pissenlit

Son nom

Taraxacum signifie «je trouble, j'agite», par allusion à ses propriétés diurétiques, ce que confirme le nom de «pissenlit» qu'on lui donne en français. Officinale signifie «préparé en officine». Médicinal, quoi!

Son rôle dans l'environnement

«C'est le pissenlit, écrit le frère Marie-Victorin dans La Flore laurentienne, qui donne, vers le commencement de mai, la première miellée notable du printemps, fournissant abondamment aux abeilles - que l'on peut cesser de nourrir à ce moment - nectar et pollen.»

Et ça se mange?

Ça ne fait pas que se manger, ça se boit aussi! On fait de la salade avec les jeunes feuilles (voir notre recette dans Documents associés), un légume d'accompagnement ou des marinades avec les boutons floraux, et du vin avec les fleurs.

On peut aussi couper les feuilles en chiffonnade et les ajouter aux sandwiches, aux soupes (à la fin de la cuisson) ou à du fromage de chèvre crémeux.

Est-ce que ça soigne?

Ben tiens! Puissant tonique, nettoyeur du sang, stimulant de la sécrétion biliaire, capable de réveiller tout organisme qu'une alimentation riche et le manque d'exercice ont rendu paresseux, le jus de pissenlit, à raison d'une ou deux cuillérées à soupe le matin et le soir, était jadis conseillé en cure d'un mois au printemps. On l'exprime de préférence le jour même à l'aide d'un extracteur à jus. Il se prépare avec moitié feuilles et moitié racines et se boit en remerciant les dieux et déesses d'être aussi efficace à petites doses. Parce que, à plus hautes doses, on serait franchement pas capables!

Il paraît que c'est un remède divin pour tout ce qui s'appelle arthrite, arthrose, rhumatismes, à la condition de suivre la cure tous les printemps sans faute. Même les médicaments à base de cortisone ne seraient pas aussi efficaces, sans parler du fait qu'ils sont nettement plus toxiques. Pour en savoir encore plus sur les propriétés médicinales du pissenlit, voyez notre fiche complète.

On les récolte quand ces feuilles?

C'est simple : dès qu'elles sortent de terre et jusqu'à l'apparition des boutons floraux, soit environ de la mi-avril à la mi-mai sous nos latitudes. Idem pour les racines, qui offriront toutefois une deuxième récolte à l'automne.

Prudence!

N'allez pas cueillir vos pissenlits sur un terrain qui a été traité aux insecticides, herbicides, fongicides ou engrais chimiques. Vaut mieux éviter ce genre d'assaisonnement, c'est pas très bon pour la santé. Ignorez également les bords de routes très passantes et tout endroit où la pollution peut être importante. En cas de doute, abstenez-vous!

L'arracheur de racines de pissenlit

Essentiel pour ramasser les profondes racines sans trop abîmer votre pelouse ou terrain. Il s'agit d'un tube qu'on enfonce dans le sol et qui permet de retirer une carotte de terre avec la racine au centre.

Saviez-vous que?

Dans les années soixante, on fabriquait encore du caoutchouc avec le latex qu'exsude le pissenlit.

Jusque dans les années quarante, les jeunes filles de «bonne famille» étaient mises à contribution pour la récolte des fleurs de pissenlit avec lesquelles on faisait un vin médicinal qu'on offrait aux religieuses de l'«asile» pour le soin des malades. Ce vin était réputé remontant, tonique et à peu près bon pour tout.


Le pin

 Le pin

Ca se mange pour de vrai?

Si on vous demandait comme ça : « Tu les veux comment tes pousses de pin? », la réponse « Ben en salade, tiens! » ne vous viendrait peut-être pas spontanément. Et pourtant, c'est comme ça que les Iroquois apprêtaient les jeunes pousses du pin blanc (Pinus strobus). Du moins, ils les mangeaient crues. Les pousses de diverses autres variétés étaient également consommées crues par des groupes d'Amérindiens de la Colombie-Britannique.

En salade donc ou ajoutées à une potée de légumes en fin de cuisson, elles vous surprendront certainement. Et puis même s'il n'est fait nulle mention dans la tradition de leur cuisson, on pourrait essayer de les faire cuire légèrement à la vapeur, en les assaisonnant encore chaudes avec une vinaigrette moutardée. Ça ne peut pas être mauvais...

Du pin qu'on dit médicinal

On croit que les quelques marins de Jacques Cartier, qui n'étaient pas encore morts du scorbut lorsque leur bateau accosta en Gaspésie, furent sauvés par l'infusion des aiguilles d'une variété de pin que les Indiens Micmac leur apprirent à préparer.

Depuis toujours, les Européens récoltent les jeunes pousses d'une autre variété de pin, le Pinus sylvestris ou pin sylvestre, aujourd'hui planté un peu partout en Amérique du Nord. Ils en font une tisane qu'ils prennent traditionnellement pour soigner l'inflammation de la muqueuse des bronches ou, en inhalation, le rhume de cerveau. Ils en préparent également une lotion pour soigner les plaies rebelles et le rhumatisme.

C'est dans le bain que ça se passe le mieux

En Allemagne, la tradition des bains médicinaux est solidement établie. Vieille de plusieurs centaines d'années, elle s'est raffermie sous l'influence du médecin hygiéniste Kneipp, qui préconisait des bains pour à peu près tout et n'importe quoi. Parmi les diverses plantes employées, le pin jouissait d'une excellente réputation pour le traitement de diverses maladies nerveuses ainsi que des problèmes névralgiques et rhumatismaux.

Il existe, bien sûr, diverses préparations pour le bain à base d'huile essentielle. Peut-être sont-elles plus pratiques à utiliser que les jeunes pousses, mais elles sont infiniment moins pittoresques! De plus, elles ne vous offrent pas l'occasion d'une bonne balade au cœur d'une forêt ou d'un taillis de pins, à humer un air complètement saturé d'une puissante essence camphrée-citronnée. Est-ce que ce n'est pas tout aussi médicinal ça?

On les récolte où et comment?

Au Québec, le pin blanc n'est plus que l'ombre de lui-même. L'arbre gigantesque, au tour de taille impressionnant, dont les remarquables colonies caractérisaient la forêt mixte de la région laurentienne est devenu bateau, poutre, poutrelle, planche, tonneau. À cette surexploitation, s'est ajoutée une maladie qui a fait des ravages énormes dans les populations indigènes. Aux États-Unis, ce sont des milliers d'hectares qui ont ainsi disparu en l'espace de quelques décennies.

Mais on trouve tout de même du pin blanc ou encore du pin sylvestre en plusieurs endroits. Comme tous ceux de leur genre, ils poussent généralement en terrain sec et sablonneux. Ne les recherchez donc pas en bordure de rivières ou de lacs, mais plutôt sur les sommets rocheux. Ou encore, demandez au propriétaire d'une plantation s'il accepterait de vous laisser prélever quelques pousses.

Ces dernières se récoltent à l'extrémité des branches là où les aiguilles ne sont pas encore développées. Pour les salades, mettez de côté les pousses les plus tendres. Elles doivent casser sur une simple pression des doigts. Les moins tendres iront dans le bain. Si vous avez la chance de rencontrer un spécimen âgé (autour de 60 à 80 ans, paraît-il, encore que c'est pas évident de deviner l'âge d'un arbre), choisissez-le de préférence à tout autre car, d'après les Allemands, c'est à cette étape de la vie du pin que les pousses sont les plus intéressantes.

De retour à la maison, faites-les sécher sur une toile moustiquaire à l'abri de la lumière et de l'humidité. Conservez-les dans une boîte de carton, un sac de papier kraft ou un contenant de verre ou de métal.

Pour le bain, vous avez le choix entre mettre vos jeunes pousses - fraîches ou séchées - dans un sac de tissu que vous aurez spécialement cousu pour l'occasion et qui trempera avec vous dans l'eau du bain ou encore de préparer une infusion concentrée dans deux ou trois litres d'eau, laquelle infusion vous ajouterez à l'eau du bain. D'une manière ou de l'autre, il vous faudra environ 500 g de jeunes pousses. Après le bain, il est recommandé de s'étendre pendant une demi-heure, voire une heure, avant de reprendre ses activités habituelles.

Saviez-vous que?

Il n'y a pas si longtemps encore, on confectionnait avec les aiguilles de pin une laine (dite laine de bois, laine de forêt ou laine végétale) ainsi qu'une flanelle végétale (encore appelée ouate ou coton de pin) qui servaient à fabriquer des matelas.

À cause de leur nature acide, les aiguilles de pin constituent un excellent paillis pour les fraisiers qui les préfèrent nettement à la paille. Elles conviennent aussi aux plantes ornementales qui poussent en milieu acide (azalées, rhododendrons).