-Anatomie et physiologie • Animaux et l'environnement • culture generale • economie • flore et ses bienfaits • Internet et Informatique • L'alimentation et la nutrition • La Biologie • Le mésothéliome • Les épices • Les fruits et légumes • Les vitamines • Maladies & Affections • Médecine et traitements • Médicaments • monde technologique • remèdes naturels • Santé et Bien-être • sciences et génie -orange

jeudi 1 octobre 2020

Peuplier

 Peuplier

Son nom

Il existe plusieurs interprétations possibles du nom « peuplier » qui vient du latin populus et signifie « peuple ». On a dit que c'était parce que, chez les Romains, on le plantait dans les lieux publics. D'autres veulent que ce soit parce qu'il était extrêmement populaire (de populeir, « qui appartient au peuple »), notamment chez les Celtes qui lui vouaient un véritable culte. Mais celle que je préfère est la suivante : le bruissement que font ses feuilles au moindre souffle de vent rappelle le bruit confus d'une foule.

De toutes les espèces, le peuplier faux-tremble (P. tremuloides) - ou son équivalent européen, le tremble (P. tremula) - est celui dont les feuilles s'agitent le plus. À cause de cette caractéristique, il s'est vu attribué toutes sortes de légendes, ainsi qu'une symbolique « religico-mystique ». Ainsi, les premiers chrétiens croyaient que les feuilles tremblaient de honte, le Christ ayant été soi-disant crucifié sur une croix faite de bois de tremble.

En France, dans certaines régions, on donnait jadis au peuplier noir (P. nigra) le nom de « liard » (de « lier »), les jeunes tiges de cet arbre ayant souvent remplacé l'osier. Au Québec, on a attribué ce nom à deux espèces, le P. balsamifera et le P. deltoides.

Son rôle dans l'équilibre écologique

Construit pour supporter les températures froides, le peuplier baumier, notre principale espèce indigène, est le seul arbre feuillu qui puisse être planté dans les villages du nord. Quant au peuplier faux-tremble, il s'accommode des sols les plus pauvres et prend rapidement possession des terrains ravagés par le feu et, par là, freine l'érosion du sol.

Le peuplier noir, ou peuplier de Lombardie, a été largement planté tant ici qu'aux États-Unis, surtout pour servir de haie le long des routes. Caractéristique intéressante, selon le frère Marie-Victorin, « tous les peupliers de Lombardie plantés en Amérique sont mâles, ce qui semble indiquer une origine par multiplication végétative, à partir d'un même individu ». Bref, si le brave frère ne se trompe pas, cela signifie que tous les peupliers de Lombardie d'Amérique n'ont qu'un seul parent à partir duquel on a produit des centaines de milliers de clones, issus de clones, issus de clones, etc. Bonjour la diversité!

Puisqu'il est question de diversité, soulignons qu'il se plante chaque année au Québec d'immenses surfaces de peupliers, tout cela pour satisfaire notre faim insatiable et démesurée de papier, car c'est là le principal usage de cet arbre dont le bois est mou et de piètre qualité. Là où il y avait jadis des érables, des bouleaux et d'autres espèces nobles, on plante du peuplier à tour de bras, notamment des variétés hybrides qui poussent beaucoup plus rapidement que les variétés traditionnelles et peuvent donc fournir de la pulpe en un temps record. Très bien adaptés à leur milieu naturel, les peupliers peuvent devenir de véritables nuisances lorsqu'on cherche à les implanter là où ils ne devraient pas l'être, d'autant plus qu'ils entretiennent une cour extrêmement diversifiée, elle, d'insectes et de maladies : des enrouleuses, des lieuses, des plieuses (ma foi d'honneur, on se penserait en plein atelier de papier d'emballage!), des galles, des mineuses, des pucerons, des phytoptes, des scolytes, des saperdes, des perceurs, des charançons, des charpentiers, des altises, des acronyctes, et j'en passe!

Et ça se mange?

Au printemps et au début de l'été, l'écorce interne du peuplier baumier est épaisse, sucrée et juteuse, si bien qu'elle a été beaucoup consommée par les Amérindiens. On la préférait à toute autre, au point qu'on n'hésitait pas à la manger sur place. Les plus généreux rapportaient les surplus d'écorce au campement pour en faire une sorte de dessert en la mélangeant à de la graisse de poisson-chandelle ou à une autre huile. Sucrée, elle se détériore rapidement par fermentation, ce qui est un avantage lorsqu'on veut en faire une boisson aux propriétés enivrantes. Justement, c'était parfois le cas et on l'a donc utilisée à cette fin. Les Amérindiens ont également consommé l'écorce du peuplier faux-tremble (P. tremuloides) et du peuplier à grandes dents (P. grandidentata). En Europe et en Asie, on a consommé l'écorce de divers peupliers. On la faisait sécher et on l'ajoutait au pain et aux bouillies.

Au printemps, les Kootenay de l'Ouest avaient l'habitude de récolter la sève du peuplier baumier et de la consommer comme boisson. On la récoltait aussi en juin, à l'occasion du rituel de la Danse du Soleil, afin qu'elle serve de boisson rafraîchissante aux participants qui, durant quatre jours d'affilée, devaient jeûner et danser.

On a mangé les bourgeons, l'écorce interne et les semences du P. deltoides. Les inflorescences et les jeunes pousses se mangent cuites. En période de disette, les feuilles de diverses espèces ont également été consommées, mais elles ne sont pas très savoureuses.

Chez certaines nations, les cendres ont servi de sel avant l'arrivée des Blancs. De plus, le bois a servi à fumer les aliments.

À noter qu'il pousse sous le peuplier baumier un champignon comestible qui vit en symbiose avec lui. Il s'agit du Tricholoma populinium (ou champignon du peuplier) prisé depuis toujours des Amérindiens de l'Ouest.

Et ça soigne quoi?

Le peuplier est diurétique, éliminateur de l'acide urique, antiputride urinaire, aseptisant et fluidifiant des sécrétions bronchiques, ainsi que tonique.

Les bourgeons

Les bourgeons du P. nigra ont été recommandés par voie interne dans les maladies chroniques du poumon et des voies urinaires, ainsi que dans les rhumatismes chroniques.

On en faisait soit une infusion, soit une teinture (une partie de bourgeons frais et 6 parties d'alcool à 33 degrés), soit un extrait fluide entrant dans la composition d'un sirop contre la toux.

Tout comme le saule avec qui il partage la même famille botanique, le peuplier est riche en salycates. Lors de l'ingestion des bourgeons, les salycates se transforment en acide salicylique à l'état naissant (en Aspirine, quoi!), d'où leur action calmante. 

En Amérique, ce sont surtout les bourgeons du P. balsamifera et, à un moindre degré, ceux du P. deltoides, qui ont servi en médecine, notamment pour diverses préparations dont le sirop composé de pin blanc, ainsi que pour la confection d'onguents et de pansements.

L'infusion se prépare à raison de 2 cuillerées à soupe de bourgeons dans ½ litre d'eau bouillante. Ou de 2 à 4 gros, écrivent les soeurs de la Providence, dans une chopine de vin ou d'eau. Un gros, pour ceux qui l'ignorent, c'est exactement un drachme, ou 72 grains, ou 3 scrupules, ou 4 grammes... Et une chopine, c'est un demi-litre. Voilà tous les secrets des Anciens dévoilés! Infuser 15 minutes. Prendre 3 tasses par jour.

On s'est aussi servi de la décoction en compresse contre les douleurs arthritiques ou rhumatismales.

Le vin de bourgeons de peuplier est un incontournable tonique du printemps. Il se prépare en faisant macérer 100 grammes de bourgeons concassés dans un litre de vin. En principe, on ajoute 40 grammes d'écorce d'orange amère histoire d'augmenter son effet tonique, mais on peut s'en passer. Au bout de dix jours, filtrer. À noter que les amateurs de bon vin ont tout intérêt à se préparer psychologiquement avant d'ingurgiter cette potion extrêmement résineuse à saveur de propolis et à l'arôme de térébenthine, qui éteint toute autre sensation gustative pendant les heures qui suivent. On en prend 50 ml, deux fois par jour avant les repas.

L'onguent populeum, version allégée

Composé de bourgeons de peuplier, ainsi que de belladone, de jusquiame, de morelle noire et de pavot, l'onguent populeum est un remède traditionnel que l'on employait jadis dans le traitement des douleurs rhumatismales aiguës, des hémorroïdes et des gerçures. Comme toutes les plantes de cet onguent sont, à part le peuplier, interdites de séjour, dangereuses ou socialement inacceptables, voici une recette peut-être moins intéressante, mais tout à fait orthodoxe :

Utiliser soit 500 grammes de saindoux (graisse de porc vendue en épicerie), soit 250 grammes de saindoux et 250 grammes de cire d'abeille.

Faire fondre dans un bain-marie, puis ajouter 200 grammes de bourgeons de peuplier baumier. Laisser frémir pendant une demi-heure.

Ôter du feu, laisser légèrement refroidir, puis vider la préparation dans un mortier et triturer intimement jusqu'à ce que le mélange soit onctueux et homogène.

Mettre dans des pots peu profonds à large ouverture et conserver au frais. (En théorie, les principes résineux des bourgeons devraient empêcher le saindoux de rancir.)

 

Les préparations à base de saindoux uniquement (sans cire d'abeille) peuvent servir à la confection de suppositoires qui pourront être administrés en cas d'hémorroïdes. Mouler les suppositoires à la main, puis les réfrigérer pour qu'ils gardent leur forme.

L'écorce

Plutôt amère, l'écorce du peuplier noir a servi de succédané à la quinine dont elle possède les propriétés toniques. On s'en servait jadis pour traiter les cas de débilité, d'indigestion, de perte de conscience, d'hystérie, ainsi que pour les troubles urinaires. L'écorce du P. alba européen a servi à soigner la sciatique et les brûlures. Quant à l'écorce du faux-tremble, on croit que les Amérindiens s'en servaient comme vermifuge. On a, en outre, employé cette écorce, et parfois les feuilles, pour le traitement des fièvres.

Dans la tradition herboriste américaine, l'écorce de diverses espèces de peuplier a été utilisée dans des composés destinés aux femmes souffrant de troubles menstruels.

Le bois

Utilisé en médecine comme antiseptique intestinal, le charbon végétal est généralement fait avec du bois de peuplier (ou de bourdaine). Absorbant des gaz intestinaux, des toxines microbiennes et de divers poisons, il peut diminuer sensiblement les effets dévastateurs de ces substances toxiques, d'où son emploi traditionnel dans les ballonnements, les diarrhées putrides, les colites et les intoxications, alimentaires ou autres. En principe, on devrait pouvoir fabriquer du charbon végétal avec un équipement des plus rudimentaires. Toutefois, il est important que la combustion du bois se fasse très lentement et de façon incomplète. Jadis, on empilait le bois en tas volumineux que l'on recouvrait de paille humide ou de terre avant d'y mettre le feu. Aujourd'hui, on procède souvent par distillation à l'abri de l'air.

Les feuilles

On appliquait jadis les feuilles sur les coupures et les plaies ulcérées. En Europe, on a employé un extrait liquide des feuilles du P. tremula (très proche de notre faux-tremble) pour soulager l'inflammation accompagnant l'hyperplasie de la prostate. Cette action serait attribuable aux glucosides de salicylé que renferment les feuilles.


La passiflore

La passiflore

Son nom

Le nom de « passiflore » vient de ce que la fleur est supposée rappeler la Passion du Christ. Les filaments au centre sont censés représenter la couronne d'épines, d'autant plus qu'ils seraient au nombre de 72, précisément le nombre d'épines, à ce qu'il paraît, qui ornaient la couronne du Christ. De son côté, avec ses trois styles, le pistil représenterait les trois clous utilisés pour sa crucifixion tandis que les cinq étamines teintées de rouge à la base symboliseraient les cinq plaies. Enfin, la feuille à la pointe aiguë représenterait la lance et sa face inférieure, marquée de taches rondes foncées, les 30 pièces d'argent que le perfide Judas reçut pour avoir trahi son maître.

On attribue cette légende ainsi que l'origine du nom de la plante, à Jacomo Bosio, moine scolastique italien qui, en 1609, alors qu'il piochait dur, mais sans grands résultats, sur son traité consacré à la croix et au calvaire du Christ, eut la chance inouïe de rencontrer Emmanuel de Villegas, moine mexicain en voyage à Rome qui avait en sa possession des illustrations d'une fabuleuse fleur, alors parfaitement inconnue en Europe.

D'abord sceptique quant à l'existence d'une telle merveille, Jacomo Bosio dut se rendre à l'évidence, car d'autres personnes ayant voyagé dans ce qu'on appelait encore à l'époque la nouvelle Espagne, confirmèrent les dires du moine mexicain. Absolument ravi, le moine érudit trouva là l'occasion unique non seulement d'enjoliver son traité et, par là, de lui donner un petit coup de pouce publicitaire, mais également d'apporter la preuve absolue de l'existence du Christ et de sa Passion, car Dieu son Père n'avait-il pas justement mis volontairement sur le chemin de l'Homo désespérément incredulus cette fabuleuse fleur arborant les symboles du calvaire réunis?

La foi du moine a de quoi édifier parce que, pour nous simples mortels encore attachés aux plaisirs de ce monde, la fleur de la plante rappelle tout sauf la Passion du Christ. Avec ses organes de reproduction démesurés qu'elle expose sans la moindre pudeur et le parfum capiteux qu'elle dégage, on tomberait plutôt ici dans le domaine de la passion humaine.

Et ça se mange?

Le fruit de nombreuses espèces se consomme. Vous avez d'ailleurs certainement goûté au jus de passiflore puisque quelques entreprises de l'industrie agro-alimentaire en offrent sur le marché, généralement en mélange avec d'autres jus de fruits exotiques

Et ça soigne quoi?

Dans le sud, les Amérindiens se servaient des feuilles en cataplasmes pour soigner les blessures et les ecchymoses.

Quant au jus du fruit, ils s'en servaient pour soigner les douleurs oculaires. Les feuilles broyées avaient la réputation de soulager les hémorroïdes, les brûlures et les éruptions cutanées.

Absente de plusieurs traités traditionnels de matière médicale, la passiflore est restée relativement peu connue malgré ses propriétés sédatives et calmantes bien réelles et son innocuité pour la majorité des gens. À cet égard, on connaît beaucoup mieux la valériane et le houblon, qu'elle accompagne pourtant fréquemment dans les préparations d'herboristerie. Utile contre l'insomnie, les états nerveux (angoisse, hystérie, palpitations), la neurasthénie, l'excitation cérébrale, voire l'épilepsie, elle a également servi à soigner les troubles de la ménopause. Antispasmodique et anodine, elle soulage les névralgies et l'asthme spasmodique.

La passiflore a tout de même fait l'objet de quelques études récentes; ses propriétés anxiolytiques semblent sur la voie d'être confirmées. Elle serait notamment utile pour soigner l'extrême anxiété causée par le sevrage du cannabis, des opiacées ou de l'alcool. On croit aussi qu'elle peut soigner l'azoospermie, c'est-à-dire l'absence de spermatozoïdes dans le sperme, ainsi que la stérilité et la baisse de libido dont souffrent bien souvent les grands consommateurs d'alcool ou les fumeurs invétérés...

Enfin, la passiflore aurait récemment montré des propriétés antitussives qui confirmeraient son usage traditionnel dans l'asthme.

On la prend sous la forme d'une infusion des feuilles à raison d'une cuillerée à dessert par tasse d'eau bouillante, à infuser dix minutes. Prendre deux ou trois tasses par jour entre les repas, dont une au coucher. Les fleurs sont également efficaces, mais comme elles sont plus rares, on se contente généralement des feuilles. À noter que si vous ramassez les fleurs sur vos plants, vous n'aurez pas de fruits. Désolée, c'est comme ça!


 

Oxalide

 Oxalide

Son nom

Oxalis signifie «oseille», par allusion à la saveur acide de la plante, très proche de celle de l'oseille. Pain d'oiseau, pain de coucou, surette, surelle, trèfle aigre, oseille à trois feuilles, oxalis vulgaire, alléluia, ce sont là les autres noms qu'on a donnés en France à cette plante (il s'agit en fait de l'Oxalis acetosella), dont on connaît ici une variété très proche (l'Oxalis stricta) et qui peut être utilisée aux mêmes fins. Si on l'a appelée « alléluia », c'est qu'en France, elle fleurit à Pâques. Chez nous, la floraison se produit au début de l'été.

Son rôle dans l'équilibre écologique

On ne se rend pas toujours compte à quel point de petites plantes apparemment insignifiantes sont essentielles aux oiseaux, particulièrement à l'automne, lorsqu'ils doivent entreprendre leur grande migration vers le sud et ont besoin d'une nourriture riche en hydrates de carbone et en gras. Les graines - toutes les graines - répondent exactement à ce besoin, et celles de l'oxalide sont particulièrement appréciées. D'où les noms de « pain de coucou » et de « pain d'oiseau » que le langage populaire lui a donnés.

L'oxalide en cuisine...

Tout comme l'oseille, l'oxalide est réputée pour son acidité, aux effets positifs sur la digestion. Elle peut d'ailleurs remplacer cette dernière en cuisine : dans les soupes, les salades, les omelettes, les sauces à base de crème, les quiches et autres plats aux oeufs, le fromage frais (notamment de chèvre), le veau, le porc, le poisson, qu'elle accompagne merveilleusement. À ce titre, vous pouvez préparer une sauce rapide en faisant tout simplement suer une poignée de feuilles émincées dans un peu de corps gras - beurre ou huile d'olive. Nappez-en un filet de morue ou un autre poisson.

Les Saulteux, Amérindiens de la famille des Algonquiens, cuisaient les feuilles d'oxalide avec du sucre et mangeaient le tout comme dessert. En Europe aussi on l'a mangée en dessert, mélangée à du miel et des raisins secs.

Si vous passez la plante à l'extracteur, vous recueillerez quelques gouttes de jus qui pourra servir de substitut au vinaigre. Essayez-le en vinaigrette avec de l'huile d'olive ou dans une mayonnaise maison.

Les jeunes fruits, cueillis avant maturité lorsqu'ils sont encore tendres peuvent être ajoutés crus aux salades. Quant aux feuilles, dans certaines régions d'Europe, on les a lactofermentées pour en obtenir une sorte de choucroute. Mais comme la plante est petite et que, par conséquent, il faudrait en ramasser des quantités phénoménales si on la mettait seule à fermenter, ajoutez-la plutôt au tonnelet de chou.

Mais c'est peut-être dans la limonade que l'oxalide montre ses plus grands talents. Vous pouvez préparer une boisson simple en faisant bouillir pendant quinze minutes une grosse poignée de feuilles et de tiges dans un litre d'eau. Ajoutez du miel au goût, laissez refroidir et servez sur de la glace pilée. Pour ma part, j'aime bien préparer une boisson « aux trois citrons », avec de l'oxalide (ou de l'oseille), de la mélisse et quelques gouttes de jus de citron. Le mode de préparation de l'infusion est le même. On ajoute le citron uniquement quand la boisson est froide et on sert sur de la glace.

Employez-la fraîche, jamais séchée, car le séchage lui fait perdre toute sa saveur et ses propriétés. Par contre, elle se congèle très bien.

À cause de son acidité, utilisez de préférence des ustensiles et casseroles en acier inoxydable quand vous préparez et cuisinez l'oxalide pour éviter qu'elle ne se décolore.

Elle soigne quoi?

Jadis, on la prenait au printemps pour purifier le sang, chargé des toxines qui s'étaient accumulées tout au long de l'hiver. On l'a également prise pour traiter les ulcérations de la bouche et de la gorge : on en mastiquait quelques feuilles ou la mangeait en salade. On lui attribuait en outre des vertus antiscorbutiques, ce qui est tout à fait plausible puisqu'elle est relativement riche en vitamine C. En bêta-carotène aussi, d'ailleurs.

On l'a de plus employée en voie externe : les feuilles cuites étaient appliquées en cataplasmes afin de favoriser la suppuration des abcès froids. Froids, par opposition bien sûr, à chauds, c'est-à-dire que contrairement à ces derniers, ils ne s'accompagnent pas d'inflammation aiguë (donc de chaleur, de rougeur, de gonflement et de douleur).

On la trouve où?

L'oxalide dressée se plaît dans les terrains secs et sablonneux, quoique j'en ai vu pousser dans des sols plutôt argileux. Elle aime le soleil franc, tandis que sa cousine, l'oxalide des montagnes, également comestible, préfère l'ombre des sous-bois. Comme elle est petite - elle atteint rarement 15 centimètres - il faut avoir l'oeil exercé pour la repérer, mais une fois qu'on la connaît, on ne s'y trompe plus. Au nombre de trois, ses feuilles en forme de coeur ont la particularité de se plier lorsqu'il fait soleil et de se redéployer à la tombée du jour ou quand il pleut.

Précautions

Comme c'est le cas pour l'oseille (ainsi que pour la rhubarbe d'ailleurs) la teneur en acide oxalique et en sels dérivés de l'oxalide fait qu'il faut limiter les quantités que l'on consomme. Les oxalates peuvent notamment interférer avec le métabolisme du calcium dans l'organisme, particulièrement si on a une alimentation pauvre en calcium. Toutefois, restreindre l'emploi ne veut pas dire que l'on doive se priver de manger une bonne soupe ou une bonne sauce à l'occasion. C'est l'usage quotidien qui est à proscrire ici.

Saviez-vous que?

C'est l'oxalide et non le trèfle qui serait l'emblème des Irlandais. Encore que certains ne sont pas du tout d'accord avec cela.


L’orme

 L’orme

Son nom

Le nom latin Ulmus est peut-être dérivé de « alnus » (aulne) par association de forme entre les deux arbres. « Orme » dériverait simplement de « olme », lui-même dérivé de ulmus.

« Rouge » renvoie naturellement à la couleur de l'écorce, tandis que « gras » réfère à la richesse de la dite écorce en substances mucilagineuses.

Il existe en France une vieille expression qui dit: « Attendez-moi sous l'orme » et qui signifie qu'on n'a pas du tout l'intention de se rendre à un rendez-vous. Pourquoi avoir fait de cet arbre bénéfique le symbole du rendez-vous volontairement manqué ? Allez donc savoir !

Écologie de travers

Le majestueux orme blanc qui occupait de vastes étendues dans tout l'est de l'Amérique du Nord a pratiquement disparu de nos paysages, à la suite de l'introduction d'une maladie fongique portant le charmant nom de Ceratocystis ulmi (que l'on a gentiment traduit par maladie hollandaise de l'orme) et qui, depuis son lieu d'origine en Asie, a d'abord essaimé en Europe vers 1914 avant de débarquer avec armes et bagages à New York, en 1930, puis au Québec en 1944, plus précisément à Saint-Ourse où elle fut repérée pour la première fois. Transportée par deux espèces d'insectes vivant dans l'écorce des ormes, elle a exterminé, en quelques décennies à peine, pratiquement toute la population de cette espèce, « sans contredit, écrit le frère Marie-Victorin, le plus bel arbre de l'Amérique septentrionale ».

À cette époque, on a vu des hommes, du type costaud et trempé dans l'acier, pleurer comme de petits enfants devant la lugubre désolation qui régnait sur leurs forêts jadis si belles. Car le bois de l'orme était grandement prisé pour ses nombreuses qualités. Dur et fort, il était employé dans la construction maritime du fait qu'il se conserve bien sur l'eau, de même qu'en ébénisterie, carrosserie, tonnellerie. De plus, on se servait de son liber pour fabriquer les fonds des chaises rustiques. Bon an mal an, les paysans en tiraient donc un revenu d'appoint non négligeable, en plus d'avoir le privilège de jouir à volonté de la splendeur de sa ramure.

On a vu d'autres hommes tenter désespérément de sauver leurs plus beaux spécimens en perçant des trous dans le bois et en y vidant qui de l'essence, qui de la térébenthine, qui de l'huile dormante dans le fol espoir que ces traitements ralentiraient l'inéluctable progression de la maladie. Certains ont réussi, la majorité ont échoués.

Heureusement pour notre propos, l'orme rouge n'a pas été autant affecté par l'affreuse Ceratocystis, peut-être à cause de son odeur forte, causée par la présence de coumarine dans l'écorce. Comme quoi, sentir fort a parfois du bon.

Et ça se mange?

En Europe, on a mangé les jeunes feuilles de deux espèces d'orme, en les faisant d'abord sécher, puis en les pulvérisant et en les ajoutant aux soupes ou aux bouillies. On s'en est également servi pour faire de la tisane et, en Angleterre, pour adultérer le thé de Chine.

On a consommé les jeunes fruits - des samares de forme arrondie - après les avoir fait bouillir.

Comme la majorité des écorces, celle de l'orme (diverses espèces) a servi d'aliment de subsistance, et nombreux sont les explorateurs qui ont affirmé lui devoir la vie. Idem pour les Amérindiens qui la consommaient en période de disette. C'est l'écorce intérieure que l'on consomme. Réduite en poudre, elle est hautement nutritive, notamment parce qu'elle est riche en amidon. Traditionnellement, on en préparait une sorte de gruau, qui offrait l'avantage d'allier ses qualités nutritives à ses vertus médicinales. On le servait comme nourriture aux bébés, aux convalescents, aux vieillards et à tous ceux qui souffraient de troubles gastriques (voir notre recette dans Documents associés). Ceux, notamment, qui avaient trop et mal mangé durant la période des Fêtes et dont l'estomac ne cessait de rechigner malgré un retour à de saines habitudes alimentaires...

Et ça soigne quoi?

De tous les arbres, l'orme serait, selon certains, le plus utile médicinalement parlant. Selon d'autres, ce serait carrément la plus importante de toutes les plantes médicinales dont nous disposons et, à ce titre, elle devrait figurer dans toutes les pharmacies domestiques, à côté de la crème au souci et de la teinture d'ortie.

Dans certains milieux, on affirme d'ailleurs volontiers que les chèvres, les moutons et les lapins connaissent d'instinct les vertus anti-inflammatoires, toniques et astringentes de l'orme et que c'est pour cela qu'ils raffoleraient de ses rameaux.

Tout comme l'orme d'Europe, notre espèce a été appréciée pour ses qualités diurétiques, émollientes et adoucissantes, tant par les Amérindiens que par nous, « pôvres » Visages pâles, malheureusement dotés d'une complexion d'un blanc tout à fait ridicule.

- Ah ça, ça dépend des goûts. Y en a qui préfèrent.

- Tiens donc, vous étiez là, vous ! Vous faites plutôt preuve de discrétion aujourd'hui ! On ne vous entend pas fort.

- C'est que les Fêtes ont été pas mal dures sur le système...

- Du genre dures comment ?

- Du genre gastrite non infectieuse. Du genre à laisser le système digestif, y compris les deux orifices, dans un état de navrante sensibilité.

- Ben vous, on peut dire que vous avez le sens de l'à-propos. Tenez, buvez cette décoction !

On l'employait contre la diarrhée et les autres irritations du système digestif ainsi que pour les irritations cutanées. « Rien de plus émollient et de meilleur pour les plaies, internes ou externes », écrivaient en 1890 les soeurs de la Providence dans leur Matière médicale.

Paradoxalement, on s'en est aussi servi sous la forme de lavement pour soigner la constipation, en la mélangeant à du lait chaud, de l'eau et de l'huile d'olive. On l'a également employée en douche vaginale pour soigner les pertes blanches.

On en a fait des pastilles pour traiter le mal de gorge et la toux. Dans les rhumes opiniâtres et la consomption, on l'employait alternativement avec de la gelée de corne de chevreuil (remède qui se préparait en faisant mijoter longuement de la corne de chevreuil dans de l'eau et en ajoutant à la préparation fortement réduite de la gélatine ou de la mousse d'Irlande). Trois fois par jour pendant neuf jours on prenait l'équivalent d'un demi-verre à vin de gelée de corne de chevreuil mêlée à du sherry. Les neuf jours suivants, toujours trois fois par jour, on prenait 1 ou 2 verres de tisane d'orme. On continuait ce traitement en alternance jusqu'à ce que le malade soit complètement soulagé.

Pour préparer la tisane, on fait infuser 1 cuillerée à thé d'écorce réduite en poudre dans une tasse d'eau. Ou alors on laisse macérer pendant une heure 60 g de morceaux d'écorce dans un litre d'eau bouillante.

Contre les inflammations de la peau, on lave les parties affectées avec une décoction concentrée, que l'on prépare à raison de 100 g d'écorce par litre d'eau. On peut, de plus, employer la décoction concentrée comme rince-bouche ou en gargarisme contre les inflammations de la bouche ou de la gorge.

On a préparé une huile à appliquer sur l'eczéma sec, en mélangeant 30 g d'écorce concassée à 100 g d'huile d'amandes douces. Il faut faire cuire au bain-marie pendant deux heures, laisser refroidir, filtrer et appliquer.

Appliquée sur les seins, l'emplâtre a servi à soigner la mastite.

Pour soigner les hémorroïdes, on fabriquait des suppositoires avec cinq parties de poudre d'écorce d'orme rouge et une partie de poudre d'écorce de chêne blanc. Il suffisait ensuite d'humidifier le mélange pour obtenir une pâte assez épaisse que l'on divisait et roulait de façon à former des sphères oblongues d'environ 2 cm de long. On laissait sécher la préparation puis, au moment de l'utiliser, on humidifiait la surface, on revêtait d'une légère couche d'huile et voilà ! Comptaient notamment parmi les autres indications très spécifiques de ces suppositoires le rétrécissement de l'anus et les fistules au fondement.

Chez les Amérindiens, on donnait aux femmes enceintes une tisane comprenant cette écorce dans le but de faciliter leur accouchement. Idem en Europe où cela était administré aux femmes enceintes à partir du septième mois.

L'écorce d'orme rouge est l'une des quatre plantes de la controversée formule Essiac qui, dans les années 1920 et 1930, fit beaucoup parler d'elle à cause de ses propriétés anticancéreuses alléguées. L'origine de cette formule serait amérindienne, bien qu'elle ait été popularisée par une infirmière ontarienne qui l'aurait employée pour soigner des centaines de patients atteints de divers types de cancer.

Si les propriétés anticancéreuses de l'écorce d'orme rouge et des autres plantes de la formule Essiac n'ont toujours pas été démontrées scientifiquement, on sait aujourd'hui avec certitude que ces plantes ont un réel impact sur la qualité de vie des patients cancéreux. Leurs propriétés toniques en feraient un remède extrêmement utile pour les personnes fatiguées, dévitalisées, stressées, déprimées, et l'orme rouge y est certainement pour quelque chose.

À noter que l'écorce intérieure des jeunes ormes a la réputation d'être beaucoup plus active que celle des sujets âgés. Les arbres d'à peine deux ou trois ans conviendraient parfaitement. Pour peu que l'on dispose d'un petit coin de terrain, on pourra donc facilement semer une poignée de graines à distance rapprochée et, en quelques années, on obtiendra une petite récolte d'une substance médicinale de première qualité. Ne coupez pas entièrement vos petits arbres et l'année suivante ils lanceront de nouvelles tiges que vous pourrez récolter à leur tour.

Enfin, sous le nom d'« eau d'orme », on a employé le liquide qui se trouve dans les diverses espèces de galles qui se forment sur l'orme. On peut supposer que, vivant entièrement aux dépens de l'arbre, ces excroissances lui soutirent également un peu de ce mucilage qui fait sa richesse médicinale. Chose certaine, on employait cette eau pour laver les plaies de toutes sortes, et elle était assez douce pour qu'on s'en serve pour laver les yeux irrités, fatigués ou gonflés. Récolté en automne, ce même liquide portait le nom de « baume d'ormeau », à cause de la texture plus visqueuse qu'il prenait durant cette saison.


Noyer

 Noyer

Son nom

Je suis assise dans un petit coin boisé de ma propriété, en train de siroter un premier café, les yeux pas tout à fait alignés dans leurs orbites, l'esprit errant encore dans quelque repli onirique, lorsque soudainement : « Toc! »! Un objet atterrit bruyamment sur les feuilles et me ramène sur Terre. Puis, « Toc! », un autre.

« Grands dieux, le ciel est-il en train de me tomber sur la tête? » Eh bien, oui et non… Non, parce que ce n'est pas vraiment le ciel qui me tombe dessus. Oui, parce qu'il s'agit bel et bien d'une intervention divine…

 En effet, si on se fie à la taxonomie linnéenne, ces OTNI (ou Objets Tombants Non Identifiés) sont l'œuvre directe de Jupiter puisque le nom générique Juglans vient de Jovis glans qui signifie « gland de Jupiter ». Toutefois, c'est sous les noms de « noyer cendré » ou « d'arbre à longues noix » qu'on connaît chez nous cet immense personnage de nos forêts, aux branches qui s'étalent presque complètement à l'horizontale, à l'écorce sillonnée d'un gris cendré et aux feuilles composées de nombreuses folioles.

Et ça se mange?

Il paraît qu'à une époque, la noix du noyer cendré a fait l'objet d'un certain commerce dans la région de Montréal, mais ce n'est malheureusement plus le cas aujourd'hui. Pour la goûter, il faudra aller en forêt la cueillir soi-même. Tout comme la noix du caryer ovale, elle est délicieuse, mais difficile à extraire. Il faudra donc vous armer de patience ainsi que d'un bon casse-noix et, ultimement, d'un instrument à bout pointu permettant de la sortir de sa coquille.

Les Amérindiens la mangeaient crue et entière ou ils la broyaient et la mélangeaient à de la farine de maïs et de haricot pour en faire une sorte de pain. De plus, ils extrayaient son huile : ils écrasaient d'abord la noix puis la mettaient à bouillir dans l'eau, après quoi il leur suffisait de recueillir l'huile à la surface de l'eau. Cette dernière servait à assaisonner le pain, les pommes de terre, les citrouilles, les courges et divers autres légumes. Quant aux tourteaux (les résidus), ils étaient assaisonnés puis ajoutés à la purée de pommes de terre. Une autre préparation consistait à écraser les noix pour en extraire un liquide laiteux que l'on prenait comme boisson ou ajoutait aux plats de maïs pour les enrichir. Enfin, on en préparait un mets fortifiant pour les papoose (les bébés) en la mélangeant à la viande de cerf séchée et en réduisant le tout en poudre.


Noisetier

 Noisetier

Son nom

Corylus signifie « casque », par allusion à la forme des bractées du C. avellana (qui donne l'aveline du commerce). «Noisetier» serait dérivé de « noisette » (et non pas l'inverse comme on pourrait le croire), lui-même étant dérivé de « noix », qui vient du latin nucis.

« Coudrier » vient, par déformation, du latin corylus. On parlait jadis de « coudrettes » et d'une « coudraie » (une plantation de coudrier). Mais pourquoi donc deux noms pour désigner un seul arbuste? Difficile à expliquer d'autant plus qu'il semble bien qu'ils soient apparus dans la langue française à peu près en même temps, soit autour du 13e siècle. « Noisetier » a fini par remplacer « coudrier » dans l'usage, mais les deux noms ont cohabité pendant quelques siècles puisque, à son arrivée au Québec au 16e siècle, Jacques Cartier remarqua une île où poussait une énorme quantité de coudres et que, pour cette raison, il nomma « Île aux Coudres ».

« Aveline » vient du nom latin (C. avellana) de l'espèce la plus souvent cultivée tant en Europe que dans l'ouest des États-Unis.

En anglais, la plante porte aussi deux noms qui semblent avoir évolué parallèlement. Ainsi, on l'appelle tantôt hazel, mot d'origine allemande, tantôt filbert, mot emprunté au français et qui vient du nom de Saint-Philibert dont on fêtait l'anniversaire le 20 août, lequel anniversaire tombait en pleine période de récolte de noisettes. Par ailleurs, dans les deux langues, le substantif français « noisette » en est venu à désigner une couleur, un petit morceau d'un aliment quelconque, un plat à base de boulettes de purée de pommes de terre, rissolées, ainsi que le beurre cuit lorsqu'il prend une teinte roussâtre.

Mystère et magie du noisetier

À cause de l'aura de mystère et de magie qui l'accompagne depuis toujours, le noisetier occupe une place à part dans l'imaginaire humain. Employé comme support d'incantation par les druides, il a aussi été utilisé par les sourciers et les chercheurs d'or. Cette tradition serait rattachée à la symbolique de fertilité qu'on lui a très tôt attribué (à cause, bien sûr, de l'abondance de noisettes qu'il produit). Par un étrange effet d'attraction des semblables, il attirerait à lui deux autres symboles de fertilité, soit l'eau de source et les métaux ayant maturé dans le ventre de la terre. En Normandie, pour qu'une vache donne du lait, on la frappait trois fois avec une baguette de coudrier. Cette pratique a d'ailleurs valu le bûcher à quelques femmes accusées de sorcellerie pour avoir ainsi frappé des vaches qui, par la suite, s'entêtaient à donner du lait toute l'année.

Une autre tradition voulait que le troisième jour de ses noces, la mariée distribue des noisettes pour signifier que le mariage était bel et bien consommé (heureuse époque, diraient certains, où l'on savait consommer lentement). Ailleurs, il revenait à la belle-mère, le jour des noces, de jeter des noisettes à la tête du marié. Avec le temps, l'expression « casser des noisettes » en est venue à désigner l'élan amoureux. C'est de cette tradition que s'est inspiré Tchaïkovski pour créer son célèbre ballet Casse-Noisette, dont on connaît la popularité chez nous puisqu'il est joué chaque année à Montréal depuis 1964.

Le bien-fondé de la méthode qui consiste à utiliser une baguette de coudrier pour repérer les cours d'eau souterrains a fait l'objet de moult discussions, certaines particulièrement houleuses au cours desquelles des hommes par ailleurs normalement constitués ont soudainement montré des comportements pour le moins bizarroïdes, lesquels ont conduit certains à se retrouver attachés sur une civière et encadrés par deux armoires à glace revêtus d'une chienne blanche. Le même phénomène s'est produit à propos de l'homéopathie. Des lieux communs ont été débités à la caisse, des mots d'une déplorable grossièreté ont été prononcés, des pitreries d'une navrante sottise ont été exécutées, des crises d'apoplexie sont survenues à la suite d'un inexplicable déchaînement de colère. Tout cela parce que l'esprit humain a un mal inouï à appréhender le fait que l'esprit infuse toute particule de matière...

- Non, mais là, attendez! Vous n'allez pas me dire que vous croyez à ces superstitions!

- Je ne suis pas là pour croire ou ne pas croire, mais pour rendre compte de, et je puis vous dire que, efficace ou pas, la pratique de sourcier persiste encore de nos jours. Même qu'il existe de nombreuses associations de sourciers à travers le monde. Même qu'elles offrent des cours pratiques. Même qu'on peut apprendre les techniques rien qu'en lisant un livre didactique. Même que des dizaines de sourciers annoncent leurs services sur Internet. Les sceptiques en font leurs choux gras et les puisatiers laissent entendre, le sourcil en l'air, que le « métier » de sourcier est sans risque dans un pays comme le Québec où l'eau souterraine abonde, et que, baguette de noisetier ou pas, de l'eau, on en trouvera toujours, ce qui n'est pas le cas, demandez à mes voisins qui, 130 mètres plus bas et 8 000 dollars plus tard, ont dû abandonner tout espoir d'en faire remonter, mais qui, une trentaine de mètres vers la gauche, en ont trouvé à n'en savoir que faire. De leur côté, les sourciers insistent pour sortir leur pratique de la sphère magico-mystico-pétée où on l'a cantonnée en affirmant que la capacité à trouver de l'eau (ou des métaux, ou une excavation souterraine) dépend tout simplement d'un bon entraînement permettant de percevoir les variations infimes du champ magnétique terrestre provoquées par l'eau, le métal ou l'excavation souterraine qu'ils cherchent. Ce don, nous le posséderions tous à la naissance, mais nous le perdrions graduellement dans les innombrables labyrinthes de l'éducation, la culture, les croyances religieuses ou scientifiques, sans compter les nombreuses autres raisons - l'opinion d'autrui, par exemple - qui, chaque jour, nous empêchent de pointer « présent »...

- Ah! Misère de misère! C'est reparti! Elle nous refait le coup des phrases à cent mots. Et on n'a même pas commencé! Je vous le dis mes chéris, « on n'est pas sorti du bois »!

Son rôle dans l'équilibre écologique

Fournissant une nourriture recherchée aux chevreuils, écureuils, oiseaux, castors, orignaux et autres affamés à fourrure ou à plumes, le noisetier, de par son port buissonnant, offre en outre un excellent refuge à toutes sortes d'animaux. De plus, on peut le planter comme haie protectrice contre les vents violents qui tantôt refroidissent, tantôt réchauffent, mais toujours assèchent champs, pâturages et jardins. Émergente et encore peu connue, cette pratique culturale mériterait d'être généralisée dans nos campagnes de plus en plus dénudées d'arbres. D'autant plus que les chevreuils qui, en tant que nuisance, arrivent à égalité avec les motoneiges et les chiens hurlants, se détourneraient peut-être plus volontiers des potagers et des vergers s'ils trouvaient des noisettes en abondance dans les haies en bordure des champs.

Et ça se mange?

Il semble bien qu'on n'ait consommé que le fruit du noisetier. On ne trouve nulle part d'allusions à de quelconques emplois culinaires pour l'écorce ou les feuilles, qui sont probablement trop astringents. Avec la noix longue et la noix de caryer - plutôt rares au Québec - la noisette est notre seul fruit oléagineux. Or, il se trouve que c'est aussi le plus digeste, toutes catégories confondues - la noix, l'acajou, la pacane, la pistache, etc. Elle se prête à une multitude de possibilités, allant de la noisette fraîche au beurre ou à la purée, en passant par le pain et une panoplie de desserts, dont le célèbre nougat.

Les Amérindiens récoltaient les noisettes sauvages du mois d'août au mois d'octobre et les entreposaient jusqu'à ce qu'elles soient complètement mûres. Pour les débarrasser de leur enveloppe hérissée de piquants, ils les enterraient plusieurs jours dans de la terre humide. Ou alors, ils les plaçaient dans un sac qu'ils frappaient avec un bout de bois. Ils n'hésitaient pas non plus à fouiller les caches des écureuils et des autres petits mammifères pour chiper leurs noisettes. En guise de remerciement, ils laissaient parfois dans la cache un « cadeau » : faînes de hêtre, samares d'érable ou autres graines dont ils disposaient en abondance. Dans certaines communautés, les noisettes constituaient un important article d'échange. Dans l'Ouest, par exemple, on les échangeait contre des amélanches séchées, des baies de shepherdie ou de la racine de lewisie, extrêmement prisée malgré son amertume.

Mangées telles quelles, crues ou cuites, on les faisait également bouillir dans de la soupe, ou bien on les séchait et les mettait de côté pour l'hiver. Les Iroquois les faisaient cuire (ainsi que d'autres noix) avec de la semoule ou de la soupe de maïs, ou ils les réduisaient en poudre et les ajoutaient aux puddings et aux pains. On les faisait bouillir pour obtenir de l'huile qu'il suffisait ensuite de recueillir à la surface de l'eau. Cette huile était consommée avec du pain, des pommes de terre, de la citrouille, de la courge, du maïs et divers autres aliments. Les tourteaux étaient consommés avec des pommes de terre pilées et d'autres aliments. Dans l'Ouest, on les mélangeait à de la graisse ou de la viande d'ours, parfois avec des baies ou des racines cuites, puis on en formait des galettes que l'on faisait sécher ou bien que l'on conservait dans les intestins nettoyés d'un animal abattu. C'était considéré comme un plat de choix.

Tout comme pour nous à une certaine époque, la période de Noël était celle où les Amérindiens consommaient le plus de noisettes.

Et ça soigne quoi?

Selon les régions, les Amérindiens employaient le coudrier pour soigner certaines maladies cardiaques (ce qui peut s'expliquer par ses propriétés vasoconstrictrices) ou, avec d'autres espèces, pour soigner les maux d'yeux. Par voie externe, ils plaçaient autour du cou des tout-petits des colliers constitués de fragments de tiges, remède qui était censé calmer la douleur de la dentition.

Dans la tradition européenne et nord-américaine, le noisetier ne semble pas avoir occupé une place importante si on en juge par le peu de cas qu'on en a fait dans les traités médicaux, d'où il est très souvent carrément absent. Peut-être l'hamamélis (qui, en passant, porte en anglais le nom de witch-hazel, littéralement « noisetier des sorcières ») l'a-t-il éclipsé. On sait en effet que cette plante d'origine américaine a été rapidement adoptée en Europe pour ses remarquables propriétés vasoconstrictrices. 

Malgré tout, diverses parties du noisetier ont été employées en médecine :

Les feuilles : les feuilles constituent un bon tonique veineux et, comme on l'a dit, un bon vasoconstricteur, ce qui les rend utiles dans le traitement des varices, des troubles circulatoires et de l'oedème des jambes. En usage externe, elles sont cicatrisantes, particulièrement en cas de dermatoses.

L'écorce : par voie interne, l'écorce est fébrifuge et on s'en est servi pour soigner les états fiévreux. Par voie externe, elle est cicatrisante, particulièrement s'il s'agit d'ulcères et de plaies atones.

Les chatons : les chatons sont diaphorétiques (c'est-à-dire qu'ils font transpirer) et amaigrissants.

Les poils recouvrant l'involucre : tout comme les poils des pois à gratter (il s'agit d'une toute autre plante que l'églantier, dont le fruit possède des fins poils - désignés sous le nom de « poil à gratter » - qui provoquent une démangeaison lorsqu'on les applique sur la peau), les poils recouvrant l'involucre du fruit ont servi de vermifuge. On disait qu'ils agissaient mécaniquement, sans qu'on sache toutefois si c'était en excitant les intestins au point qu'ils rejettent tout leur contenu, vers inclus, ou si c'était en irritant et en incommodant tellement les vers que ces derniers ne souhaitaient plus qu'une chose : sortir de là dans les plus brefs délais. Personne n'a offert d'explication à cette épineuse question. En tout cas, le remède consistait à prendre une dose de poils trois matins de suite, et quelques heures après la dernière dose, à avaler un purgatif puissant.

Les feuilles se préparent en infusion à raison de 25 grammes par litre d'eau bouillante qu'on laisse macérer toute la nuit. L'écorce des jeunes rameaux et les chatons, se préparent en décoction, à raison de 25 grammes par litre d'eau pour la première et de 30 grammes par litre d'eau pour les derniers.

Enfin, sans être médicinal, le « lait » que l'on tire de la noisette agirait doucement sur les intestins en améliorant leur fonctionnement.


la moutarde

 la moutarde

Son nom

En latin, elle s'est d'abord appelée Sinapis (S. alba, S.nigra, S.arvensis, etc.), qui vient du grec sinapi, nom que l'on donnait dans cette langue à la moutarde, et qui a donné en français « sinapisme », c'est-à-dire la traditionnelle mouche de moutarde. Puis, on a découvert qu'elle appartenait au même genre botanique que le chou, si bien qu'on l'a classée dans les Brassica, mot d'origine celtique qui désigne le chou potager.

En français, on l'a d'abord appelée « sénevé » et, par déformation, « sanve ». Le mot « moutarde », qui est dérivé de « moût », n'est apparu que plus tard, lorsqu'un petit malin a eu l'idée de broyer des graines de sénevé avec du moût de vin, ce qui a donné naissance au célèbre condiment jaune. À noter que cette pratique de mélanger des graines de sénevé à du moût existait depuis longtemps, puisque Pline l'Ancien - qui a vécu au premier siècle de notre ère - en parlait déjà. Sauf qu'on s'en servait alors comme médicament et qu'il ne serait venu l'idée à personne d'en faire un condiment.

En passant, il n'existe pas, dans les dictionnaires français, de référence à l'expression « mouche de moutarde ». Il faut donc en conclure que c'est un québécisme créé par analogie avec la cantharide (ou mouche d'Espagne), dont le corps desséché était employé jadis de la même manière que la moutarde.

On l'appelle parfois « moutardin » ou « moutardon ».

Son rôle dans l'équilibre écologique

Il y a, au Québec, quatre espèces de moutarde qui poussent à l'état sauvage. Mais aucune n'est originaire d'Amérique. Elles viennent toutes d'Europe ou d'Asie. La B. kaber (ou B. arvensis), dite « moutarde des champs », est la plus répandue et, ici comme en Europe, elle est considérée par les cultivateurs comme extrêmement nuisible. Il est vrai que ses graines retiennent leur vitalité au moins quinze ans, ce qui fait qu'elle peut réapparaître dans un champ tandis qu'on croyait l'avoir éradiquée depuis longtemps.

Sauf qu'elle n'est pas que nuisible. C'est, en effet, un excellent engrais vert, du fait que ses racines ont le pouvoir de défoncer les sols trop lourds et de les ameublir en profondeur. C'est tout ça de travail en moins pour le tracteur et son cultivateur! C'est d'ailleurs pourquoi on voit de plus en plus d'immenses étendues de campagne se colorer, à l'automne, d'un beau jaune serin. En la cultivant aussi tardivement, on évite qu'elle n'arrive à maturité et ne produise ses graines. On l'enfouit à la fin de l'automne ou, si l'hiver est hâtif, on la laisse mourir de froid.

Et ça se mange?

Les graines de diverses espèces produisent une huile comestible, semblable à celle du colza, qui appartient d'ailleurs à la même famille. On l'emploie surtout dans la cuisine indienne.

On ignore trop souvent que les feuilles de moutarde ont largement été consommées dans le passé, et le sont d'ailleurs encore dans certaines parties du monde, en Asie notamment où plusieurs variétés ont été développées. En Europe, la consommation des feuilles de sanve cuites remonte au moins à l'Antiquité.

Dans le sud des États-Unis, où c'est une véritable tradition de récolter les feuilles de moutarde au printemps, on les fait cuire de longues heures avec d'autres verdures (des feuilles de navet, notamment), du bacon, du vinaigre et du citron.

Par contre, chez les Amérindiens du Canada, l'habitude de consommer les jeunes feuilles et les jeunes pousses de moutarde serait relativement récente et n'a jamais été très développée, cette plante ne faisant pas partie des ressources indigènes traditionnelles du pays.

En outre, racines, feuilles, fleurs, gousses vertes de toutes les variétés ont été lactofermentées. Tout comme le chou, la plante est très riche en ferments lactiques, ce qui permet de la transformer facilement en choucroute. En Chine, on confit au sel les racines de la moutarde joncée ou indienne (B. juncea).

La moutarde préparée est généralement fabriquée avec un mélange de graines de moutarde blanche (B. alba) et de graines de moutarde noire (B. nigra), que l'on délaie avec du vinaigre, du moût ou du verjus. La moutarde en feuilles qu'on trouve dans les épiceries asiatiques appartient à l'espèce B. juncea, à la saveur relativement moins piquante que ses cousines. Il en existe des variétés rouges et des variétés vertes.

Toutefois, sachez que même si les sélectionneurs tendent à créer des variétés à usages spécifiques, les feuilles de toutes les moutardes se mangent, et les graines de toutes les moutardes permettent de préparer le célèbre condiment, ainsi que de soigner. Par conséquent, si d'aventure, vous tombez sur une talle de moutarde sauvage (B. kaber), n'hésitez pas à la ramasser quelle que soit l'étape de son cycle.

Ainsi, récoltées jeunes, les feuilles feront un excellent légume, que vous pourrez manger cru - si elles sont très très jeunes - ou cuit, à la vapeur ou sauté. Une fois bien développées, les feuilles deviennent plus coriaces et plus amères. Qu'à cela ne tienne! Portez alors votre attention sur les fleurs, que vous pourrez ajouter en petite quantité aux salades, ou faire légèrement cuire à la manière des brocolis. Puis, dès que les jeunes gousses (qu'on appelle siliques) sont formées, cueillez-les et faites-les sauter avec d'autres légumes, des pois mange-tout par exemple. Finalement, lorsque les graines sont formées et que les siliques viennent tout juste de virer du vert au jaune, il est temps de les récolter et de les faire sécher lentement sur une toile moustiquaire. Vous pourrez toujours utiliser les graines pour faire de la moutarde préparée, mais pourquoi ne pas plutôt les faire germer en bac à l'intérieur, histoire de vous fournir en plein hiver une petite salade délicieuse, saine comme tout, avec juste ce qu'il faut de piquant pour vous réveiller les papilles gustatives?

Jeunes pousses de moutarde en bac

Préparer un terreau sans terre* en mélangeant moitié vermiculite et moitié mousse de tourbe (le terreau de feuilles est infiniment préférable à la mousse de tourbe puisque contrairement à cette dernière, il s'agit d'une ressource renouvelable, mais on n'en trouve malheureusement pas partout). En remplir des bacs de culture en bois, styro** ou fibres**.

Pratiquer de légers sillons dans le terreau tous les 2 ou 3 centimètres. Y semer les graines de moutarde assez rapprochées et recouvrir d'un peu de vermiculite. Bien arroser.

Placer les bacs sous un éclairage au néon, de préférence le type conçu pour les plantes, car son spectre lumineux est complet. Éclairer 12 à 14 heures chaque jour. À défaut de néon, on peut mettre les bacs devant une fenêtre exposée au sud ou à l'est, en veillant toutefois à les tourner chaque jour afin que la lumière soit répartie également entre les plants et qu'ils poussent bien droits.

Au bout de quelques jours, de jeunes pousses devraient sortir de terre. Les arroser deux ou trois fois par jour avec un arrosoir muni d'une pomme à très petits trous afin d'éviter de les déranger. Attention toutefois à ne pas les inonder.

Les deux premières feuilles qui apparaissent sur les tiges sont les cotylédons (ou « fausses » feuilles, parce que leur forme diffère totalement de celle des autres). C'est normalement à ce stade qu'on récolte les pousses germées de luzerne ou de haricot mungo (mung bean). Mais, dans le cas présent, il faudra patienter encore quelques jours, car c'est à un stade plus avancé - c'est-à-dire lorsque les deux premières vraies feuilles se sont formées et sont bien développées - que l'on récolte ces mini saladettes. Quand elles sont prêtes, les couper au niveau du sol avec une paire de ciseaux de cuisine, les passer à l'eau, les égoutter et les ajouter à de la laitue, des épinards ou d'autres crudités.

En semant des graines toutes les semaines, on s'assurera d'un apport régulier de jeunes verdures. On peut réutiliser le terreau des bacs si on le stérilise au four à environ 50 °C pendant une heure ou deux.

Toutes sortes d'autres plantes peuvent être semées ainsi et procurer, au coeur de l'hiver, une panoplie de nutriments de qualité. Tous les types de chou (blanc, rouge, frisé, fourrager, rave, chinois, tatsoi, mizuna, hon tsa tai, etc.), de radis (rouge, blanc, noir), de navet, de même que le fenugrec, le tournesol, le blé, le sarrasin, le canola, le shungiku, le maïs et le cresson alénois se prêtent à ce mode de culture. À côté de cela, on peut faire pousser les classiques - luzerne, trèfle, oignon - selon la méthode recommandée pour les germinations (en pot, sans terreau et à l'abri de la lumière). À noter qu'à part celles de la moutarde, les graines des plantes sauvages présentent souvent des difficultés de germination, nécessitant parfois des traitements au froid et au chaud, ce qui les rend moins intéressantes pour ce type de culture

* Nul besoin d'engrais ou de terre, les graines possédant des réserves de nutriments suffisantes pour nourrir les jeunes plantes dans les premiers temps de leur existence.

** On trouve ce type de boîte dans les pépinières ou les centres de jardinage. Elles ne sont généralement pas destinées à la vente, mais la plupart du temps, les commerçants acceptent de se départir de quelques exemplaires contre un prix modique.

Et ça soigne quoi?

Comme la majorité des plantes de la famille des crucifères, la moutarde (ses feuilles) est antiscorbutique, à cause notamment de sa très grande richesse en vitamine C. C'est en effet grâce aux barils de choucroute que les capitaines au long cours avaient eu l'intelligence de charger à bord avant le départ que les équipages survivaient au scorbut. Et n'allez pas croire que cette maladie n'existe plus à notre époque et dans nos pays riches! Selon de nombreux experts, beaucoup d'entre nous se trouvent sans le savoir dans un état préscorbutique, lié à une carence en vitamine C. D'ailleurs, en Chine, on considère les feuilles de moutarde comme un bon tonique printanier et un bon dépuratif et, durant cette saison, elles figurent régulièrement au menu. Mangez donc vos feuilles de moutarde crues ou lactofermentées aussi souvent que possible.

En Chine, on emploie les feuilles en cataplasme pour soigner les abcès de l'anus.

Le bain à la moutarde (1/2 tasse de moutarde mélangée à de l'eau froide, puis le tout est ajouté à l'eau du bain) est excellent contre les refroidissements et les frissons. Il stimule l'ensemble de l'organisme.

La mouche de moutarde fait tellement partie de notre folklore qu'il paraît superflu d'en parler. Et pourtant, nombreux sont ceux qui n'en ont jamais expérimenté les bienfaits. On l'a employée bien sûr pour soigner la bronchite, le rhume et diverses autres affections respiratoires, mais également les maladies rhumatismales, les névralgies ainsi que la congestion céphalique ou utérine (pour les crampes menstruelles, notamment), ou pour soulager les raideurs dans la zone des épaules et de la nuque et y rétablir la circulation. Révulsive, elle produit un afflux de sang dans la région du corps où on l'applique, ce qui permet ainsi de décongestionner l'organe visé par le traitement. Selon qu'on voulait préparer un cataplasme ou un sinapisme, on mélangeait la farine obtenue par broyage des graines à de la farine de lin et de l'eau tiède, ou on l'employait seule, délayée avec de l'eau tiède. On enduisait ensuite un tissu de cette préparation, on le repliait afin d'éviter le contact direct de la farine avec la peau et on appliquait le tout sur la poitrine ou le dos, en ne dépassant pas, pour le sinapisme, qui est beaucoup plus révulsif que le cataplasme, les 10 ou 15 minutes. Plus que cela et les sujets à peau fragile se voyaient couverts de cloques se transformant en plaies parfois graves, voire en gangrène. On ne rigole pas avec la moutarde!

On a longtemps prescrit les graines par voie interne pour soigner divers problèmes (dyspepsie, atonie de l'estomac ou des intestins, chlorose, gaz, constipation). C'était, soi-disant, un traitement divin contre la paralysie. Toutefois, comme l'administration par voie interne est assez délicate et peut provoquer une intoxication, cette pratique a été abandonnée.

On extrayait jadis par distillation, et après macération dans l'eau, une huile des graines de la moutarde noire. Plus pratique que la poudre, elle était employée de la même manière et pour les mêmes indications, après avoir été diluée dans 60 parties d'alcool.