L’entreprise est au cœur du système capitaliste. Elle crée à la fois de l’enrichissement personnel et de la richesse collective à travers l’emploi et la production nationale.
Il existe de nombreuses définitions et approches de l’entreprise. Nous en retiendrons trois : une définition d’ordre juridique et deux définitions d’ordre économique.
- l’approche juridique :
L’approche juridique définit l’entreprise comme : « une "société" c'est-à-dire une fiction légale conférant à une entité économique formée de plusieurs personnes qui mettent en commun des biens, des droits, des capitaux ou des services en vue d'un objet que leurs conventions déterminent ». La société peut avoir un objet civil ou un objet commercial.
- L’approche économique classique :
Cette approche présente l’entreprise d’un point de vue externe et définit l’entreprise comme : «l’agent économique dont la fonction principale est la production de biens et services destinés à être vendus sur un marché.
- L’approche sociale ou organisationnelle :
Cette dernière approche présente l’entreprise d’un point de vue interne et la définit comme : «une organisation mettant en œuvre différents moyens dans le but de produire et commercialiser des biens et des services ».
Chacune de ces approches présente une classification particulière à l’entreprise et lui attribue une fonction principale.
L’approche juridique de l’entreprise
Nous pouvons distinguer dans l’approche juridique de l’entreprise deux types de
classifications :
- une classification des entreprises selon leur objet d’activité. La société peut avoir dans ce cas un objet civil ou un objet commercial. A ce niveau la distinction entre sociétés civiles et commerciales s’avère d’une importance capitale du moment où elle s’effectue par distinction de l’objet de l’activité.
- Une classification des entreprises selon les notions de personnalité juridique et de propriété :
Cette classification permet de classer les entreprises de l’entreprise individuelle à l’entreprise nationalisée.
De façon simplifiée et en ne retenant que le critère de la propriété de capital1 de l’entreprise, on peut répartir les entreprises en trois groupes :
Les entreprises du secteur privé :
_ elles appartiennent soit à une seule personne (entreprise individuelle), soit à plusieurs associés : on parle alors d’entreprises sociétaires.
_ Dans leur grande majorité les entreprises sociétaires sont des personnes morales2 .Parmi elles, les sociétés commerciales, régies par la loi tunisienne n° 2000-93 du 3 novembre 2000, sont classées en trois catégories :
- les sociétés de personne : Les sociétés de personnes sont soient des sociétés en nom collectif, soient des sociétés en commandite simple, ou tout simplement des sociétés en participation.
La société en nom collectif :
Elle est «constituée entre deux ou plusieurs personnes qui sont responsables personnellement et solidairement du passif social. Elle exerce son activité sous une raison sociale qui se compose du nom de tous les associés ou du nom de l'un ou de quelques-uns d'entre eux suivis des mots ''et compagnie'' ».
La société en commandite simple :
Elle «comprend deux associés au moins et qui sont les commandités lesquels sont tenus, personnellement et solidairement des dettes sociales et de deux associés au moins, les commanditaires, qui ne sont tenus qu'à concurrence de leur apports ».
La société en participation :
C’est un contrat par lequel les sociétés déterminent librement leurs droits et obligations réciproques, et fixent leurs contributions aux pertes et leurs parts dans les bénéfices et dans l'économie qui pourraient en résulter.
.Remarque : Contrairement à la société en nom collectif et à la société en commandite simple, la société en participation n'a pas la personnalité morale et n'est soumise ni à l'immatriculation ni à aucune forme de publicité. Par conséquent, les tiers n'ont de relation juridique qu'avec l'associé avec lequel ils ont contracté. Les actes, opérations et contrats que conclu chaque associé doivent faire l'objet d'une information de tous les autres associés, dans un délai ne dépassant pas les trois mois à compter de la date de leur conclusion.
En cas de cessation d'activité, les associés sont tenus d'élaborer les comptes définitifs de la société et procéder au partage des bénéfices (ou la répartition des pertes) et des biens sociaux.
- les sociétés de capitaux :
Elles comprennent les sociétés en commandite par actions et les sociétés anonymes.
La société en commandite par actions :
C’est «une société dont le capital est divisé en actions. Elle est constituée par contrat entre deux ou plusieurs commandités et des commanditaires. Les commanditaires ont seuls la qualité d'actionnaires et ne supportent les pertes qu'à concurrence de leurs apports. Le nombre des commanditaires ne peut être inférieur à trois. Les commandités ont la qualité de commerçant et répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales ».
La société anonyme «est une société par actions dotée de la personnalité morale constituée par sept actionnaires au moins qui ne sont tenus qu'à concurrence de leurs apports.
La société anonyme est désignée par une dénomination sociale précédée ou suivie de la forme de la société et du montant du capital social. Cette dénomination doit être différente de celle de toute société préexistante ».
- les sociétés hybrides :
présentant à la fois les caractéristiques des sociétés de personnes et des sociétés de capitaux : entreprises unipersonnelles à responsabilité limitée (SUARL), sociétés à responsabilité limitée (SARL)
La société à responsabilité limitée (SARL) «est constituée entre deux ou plusieurs personnes qui ne supportent les pertes que jusqu'à concurrence de leurs apports ». La société à responsabilité limitée peut être constituée par une seule personne physique; dés lors, elle sera dénommée société « unipersonnelle à responsabilité limitée » (SUARL).
La dénomination sociale peut comprendre les noms de certains associés ou de l'un d'eux; elle doit être précédée ou suivie immédiatement par la mention « SARL » ou « SUARL » et de l'énonciation du capital social.
Le code des sociétés commerciales attribut un montant minimum en dessous duquel la S.A.R.L ne peut être constituée (cinq mille dinars tunisiens pour les entreprises de presse et dix mille dinars tunisiens pour les autres). Le capital social est divisé en parts sociales dont le montant ne peut être en dessous de cinq dinars. Par ailleurs, le nombre des associés d'une SARL ne peut dépasser les 50 personnes. Il convient de souligner que la loi impose aux entreprises, suivant l'activité, la soumission à une certaine forme juridique particulière. C'est dans cette optique que les sociétés d'assurance, les banques, les autres institutions financières et les établissements de crédit ne peuvent prendre la forme d'une SARL. Comme pour la société en nom collectif, le gérant peut être désigné parmi des tiers pour un mandat standard de trois ans renouvelables. Le gérant est tenu responsable de la société devant les tiers et les juridictions.
Les conventions établies, directement ou indirectement, entre la société et son gérant associés ainsi que celles établies entre la société et l'un de ses associés devra faire l'objet d'un rapport présenté à l'assemblée générale soit par le gérant, soit par le commissaire aux comptes, pour vote. En cas de SUARL la convention conclue doit faire l'objet d'un document joint aux comptes annuels.
Les gérants sont responsables individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions légales applicables aux SARL, soit des violations des statuts, soit des fautes de gestion.
La nomination d'au moins d'un commissaire aux comptes par l'assemblé générale est obligatoire pour toute SARL ayant un capital social d'au moins 20000 dinars tunisiens. Par ailleurs, le ministère des finances tuniosien peut fixer, par arrêté, un montant minimum de revenu, réalisé durant trois exercices comptables, et suivant lequel toute société commerciale est amenée à désigner un commissaire aux comptes.
Parallèlement, sur une demande d'associés représentant au moins le dixième du capital social, la nomination d'un commissaire aux comptes doit être exigée. Les commissaires aux comptes sont désignés pour une période de trois ans. Le commissaire aux comptes peut convoquer l'assemblée générale en cas de nécessité survenue dans l'exercice de son métier.
L'assemblée générale ordinaire annuelle, ayant pour objet l'approbation des comptes de gestion doit être tenue dans le délai de trois mois à compter de la clôture de l'exercice. Les documents suivants doivent être communiqués aux associés par lettre recommandée avec accusé de réception :
- le rapport de gestion;
- l'inventaire des biens de la société;
- les comptes annuels;
- le texte des résolutions proposées; et
- le rapport du commissaire aux comptes.
L'élaboration de l'inventaire au moins une fois par exercice, du bilan et du rapport de
gestion et la convocation de l'assemblée des associés au moins une fois par an sont de la responsabilité des gérants. Tout manquement à ces obligations est passible d’une amende allant de 500 à 5000 dinars tunisiens .
Les entreprises du secteur public :
_ le secteur public regroupe les seules entreprises publiques contrôlées par l’Etat. Ce sont les entreprises sur lesquelles « l’Etat peut exercer directement ou indirectement une influence dominante du fait de la propriété ou de la participation financière, en disposant soit de la majorité du capital, soit de la majorité des voix attachées aux parts émises ».
_ Néanmoins, les lois de la privatisation3 ainsi que les différentes respirations4 pratiquées par le gouvernement ont modifié considérablement le visage du capitalisme tunisien en réduisant le poids de l’Etat.
Les entreprises du secteur coopératif ou social :
_ Il s’agit de coopératives (ouvrières de production, de consommation, agricoles), des mutuelles et des associations. Constituant l’économie sociale, elles ont un poids considérable dans l’économie tunisienne aujourd’hui.
_ L’intérêt d’une classification des entreprises selon le statut juridique est de faire apparaître le degré d’intervention de l’Etat dans une économie en déterminant quelles sont les entreprises qu’il contrôle.