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dimanche 20 septembre 2020

la bardane

 la bardane

Son nom

Arctium viendrait du grec et signifierait « ours », par allusion à l'involucre, écrit le frère Marie-Victorin. L'involucre, pour les ignares dont j'étais jusqu'à il y a quelques heures, c'est « une réunion de bractées, verticillées, ou imbriquées, insérées à la base d'une ombelle, d'un capitule ou de toute autre inflorescence ». Ah ben merci! Ca explique tout! Sauf que quelqu'un pourrait-il m'expliquer S.V.P. le rapport avec l'ours ou bien ai-je l'esprit trop obtus pour saisir l'évidence même? Certains affirment que ce serait parce que l'inflorescence est rugueuse et ébouriffée, mais là, franchement, ça ne colle pas. À moins qu'il ne s'agisse d'une allusion aux griffes de l'imposant plantigrade, lesquelles, comme chacun le sait, ne sont pas rétractiles. Pas plus que ne le sont les bractées de l'involucre de la bardane, comme nous en avons tous fait l'expérience le jour où il a fallu tailler dans le vif de la chevelure pour les enlever.

L'origine du nom français est encore plus obscure. Pour certains, ce serait un emploi métaphorique du lyonnais « bardane », qui voulait dire « punaise ». Tout cela viendrait du latin populaire barrum, qui signifie « boue », la punaise ressemblant à une tache. Vous y comprenez quelque chose, vous, à ce charabia? D'autres affirment plutôt qu'il viendrait du radical latin baritare qui veut dire « s'opposer à , diverger ». Youhou! Faudrait vous entendre, là!

Lappa, qui veut dire « saisir, prendre », était le nom du genre avant que le sieur Linné n'arrive avec sa nouvelle terminologie et le repousse au niveau de l'espèce. Les Romains désignaient ainsi toutes les plantes dont les fruits s'accrochent aux vêtements.

À cause de ses particularités, de ses fruits surtout, la bardane s'est vu attribuer de multiples noms populaires au fil des siècles : artichaut, rhubarbe sauvage, tabac du diable, rapace, graquias, toques, bourrier, choubourrache, glouteron, grateron, péterolle... Et « amoureux » : tsé le genre de crampon dont on n'arrive pas à se débarrasser!

Les enfants français appellent « boutons de pompiers » les fruits qu'ils s'amusent à accrocher en rangées sur leurs vêtements. Toutefois, en passant chez les anglophones, ces derniers perdent du grade puisqu'on les surnomme « boutons du quêteux » (beggar's buttons). Dans ma jeunesse, on les désignait tout simplement sous le nom de « pipiques ».

Enfin, en France, on l'a également baptisée « herbe aux teigneux », à cause de son efficacité contre les maladies chroniques de la peau et du cuir chevelu.

Son rôle dans l'équilibre écologique

« Mauvaise herbe gênante et encombrante, de décréter le frère Marie-Victorin, qu'on ne saurait tolérer nulle part. » C'est tout à fait l'avis de mon voisin, qui m'a suggéré, fort délicatement d'ailleurs, de couper tous les plants qui poussent sur mon terrain et de leur faire subir l'ultime sacrifice du feu. S'il devait découvrir que j'en cultive dans mon jardin, cela finirait de ruiner ma réputation, déjà fort compromise par le fait que je refuse absolument de tondre les plantes sauvages qui poussent sur le bord de la route le long de ma propriété, comme le font tous les bons citoyens de la région. En passant, dans le langage des plantes, bardane signifie « importunité ».

Dotée d'une grande intelligence botanique, la plante a mis au point trois façons de disséminer ses semences. Soit les fruits se réunissent en pelotons que le vent fait rouler sur le sol. Soit ils restent sur la tige et finissent par s'ouvrir pour répandre leurs graines. Mais la troisième est de loin la plus brillante : en s'accrochant aux toisons des animaux - notamment aux queues des chats et des chiens - ou aux vêtements et cheveux des humains, ils voyagent gratos jusqu'à des endroits parfois fort éloignés de leur lieu de naissance, endroits que la plante va s'empresser de coloniser au détriment de toutes les autres espèces végétales, qui n'ont aucune chance contre sa féroce compétitivité. C'est comme ça, paraît-il, que l'on conquiert un territoire.

Et ça se mange?

En provenance d'Europe, la bardane n'est apparue dans l'alimentation des Amérindiens qu'assez récemment, d'où le peu d'usages documentés dont on dispose à cet effet. On sait que les Iroquois mangeaient les jeunes feuilles cuites et employaient la racine séchée dans la soupe. Chez les Lillooets de la Colombie-Britannique, on cueillait la racine avant l'apparition des feuilles et on la mangeait crue.

Par contre, en Europe, on l'a beaucoup consommée dans les campagnes. D'abord ses feuilles, les très jeunes seulement, car en se développant elles deviennent amères. Ensuite les pétioles des feuilles, qu'on peut manger crus ou cuits lorsqu'ils ne sont pas amers et qu'on peut faire lacto-fermenter. Puis les jeunes pousses, tout juste sorties de terre, qui se mangent crues en autant qu'on les pèle d'abord pour en éliminer la partie amère. On peut aussi les conserver dans du vinaigre. Toutefois, il arrive assez souvent qu'elles soient infestées par le perce-tige de la bardane, ce qui les rend nettement moins attrayantes.

C'est probablement au Japon qu'il se consomme la plus grande quantité de bardane par tête de pipe. Ce peuple, qui a porté l'art culinaire à un raffinement d'une exquise sobriété, a mis au point des variétés moins amères et plus tendres qu'on apprête en légume, comme la carotte, le panais ou le salsifis.

La racine peut également être lacto-fermentée. De plus, tout comme la chicorée, le pissenlit, le topinambour et le salsifis - incidemment, quatre plantes de la même famille - elle a servi à faire un succédané de café.

Un truc à retenir : lorsqu'on coupe la racine, elle s'oxyde rapidement. Après l'avoir coupée, il est donc recommandé de mettre les morceaux à tremper quelques minutes dans de l'eau très froide.

Et ça soigne quoi?

En médecine orientale, on a employé le jus de bardane contre l'appendicite, à raison d'un demi-verre que l'on recommandait de boire d'un coup. En outre, on a utilisé la décoction de semences (10 à 20 grammes par tasse d'eau) pour traiter les tumeurs du sein ou d'une glande lymphatique, pour les maladies de l'appareil digestif comme les crampes d'estomac et en cas de manque de vitalité. On soigne traditionnellement l'anémie avec des kinpira (littéralement «paix dorée» ou «morceaux précieux aplatis») de bardane, plat qui consiste à faire cuire dans une poêle la racine découpée en allumettes. On fait sauter les morceaux pendant 2 ou 3 minutes dans de l'huile, on ajoute un peu d'eau et on laisse mijoter jusqu'à ce qu'ils soient tendres. On assaisonne d'un peu de sauce tamari et on cuit quelques minutes encore, à couvert. Puis, on retire le couvercle et laisse le tout sur le feu jusqu'à évaporation complète du liquide.

La tradition européenne en a fait une plante médicinale fort appréciée, particulièrement pour ses vertus dépuratives. Décrassantes, quoi! Elle est également sudorifique, diurétique, cholérétique, antidiabétique, antibiotique, topique, antivénéneuse. On l'a utilisée pour soigner la furonculose, l'anthrax, les abcès de gorge et dentaires, les dermatoses, l'acné, l'eczéma, les plaies, la teigne, la rougeole, la goutte, les rhumatismes, le diabète, les calculs urinaires et les morsures de vipères. Son emploi en cas de diabète s'expliquerait par sa richesse en inuline, un sucre complexe que les diabétiques peuvent assimiler.

Selon le docteur Jean Valnet, la racine doit être utilisée fraîche et non séchée car sinon elle perdrait alors la plus grande partie de ses propriétés. Ce qui en limite l'emploi au printemps et à l'automne. Pour la préparer, on fait bouillir 60 grammes de racine fraîche dans un litre d'eau pendant dix minutes.

Par ailleurs, on peut également la préparer en teinture. En France, il existe un extrait de bardane stabilisé mais, à ma connaissance, il n'y a rien de tel ici.

Les feuilles fraîchement cueillies ont été appliquées en cataplasme contre les affections pulmonaires chroniques, les rhumes traînants et les rhumatismes; macérées dans l'huile d'olive, elles hâteraient la cicatrisation des ulcères aux jambes et des plaies en général.

On les a également employées pour prévenir la chute des cheveux. On confectionne une lotion en faisant bouillir une tasse de feuilles dans deux tasses d'eau. On passe, on laisse refroidir et on applique sur le cuir chevelu. Est-ce très efficace? Probablement pas mais, contrairement aux traitements classiques qui ne le sont guère non plus, ça a au moins l'avantage d'être gratuit.

En 1890, les Soeurs de la Providence écrivaient dans leur Matière Médicale que « d'après de récentes expériences, faites par un médecin distingué des E-U, les semences de bardane sont un véritable spécifique contre les maladies de la peau, même les plus invétérées ». Pour préparer le remède, on passait deux ou trois fois dans un moulin à café 450 grammes de semences puis on les ajoutait à quatre litres de whisky tiède. On laissait « digérer » dans un lieu chaud pendant quelques semaines en ayant soin de brasser tous les jours, puis on filtrait. La dose était d'une cuillère à soupe, trois fois par jour avant les repas. Il fallait, disait-on, en prendre pendant plusieurs mois mais le résultat était assuré. Ou, encore, on préparera un amer de bardane et d'aralie, aux propriétés dépuratives avérées (voir notre recette dans Documents associés).


Baie de l'églantier

 Baie de l'églantier

Son nom

Rosa vient possiblement d'un mot sanscrit qui signifierait « flexible », sans qu'on sache de la flexibilité de quoi au juste il s'agit. Ce qu'on sait, c'est que, à quelques variantes orthographiques près, le mot est le même dans toutes les langues européennes, ce qui serait une indication de sa très grande ancienneté.

« Cynorrhodon », ce mot détestable qu'on n'arrive jamais ni à écrire ni à prononcer correctement, vient du grec kunorodon, qui signifie littéralement « rose de chien », par allusion à ses propriétés alléguées de protéger contre les morsures de chiens enragés. Le nom de la variété Rosa canina (rose de chien) renvoie lui aussi à cet usage médicinal tellement ancien qu'on n'en retrouve aucune trace dans les matières médicales des derniers siècles.

À noter que « cynorrhodon » désigne tout particulièrement le réceptacle rouge renfermant les fruits (qu'on appelle à tort « graines ») du rosier et de l'églantier, soit la partie utilisée en cuisine ou en médecine.

On a également appelé la plante « gratte-cul » à cause des poils attachés aux graines - aux fruits, pardon - et que les enfants utilisaient autrefois comme poil à gratter. Cette tradition s'est également retrouvée chez les Amérindiens qui affirmaient que ceux qui consommaient les poils se trouvaient affligés de pénibles démangeaisons au postérieur.

« Églantier » vient du latin populaire aquilentum, « qui a des piquants », de acus, « pointe, aiguille ».

Contrairement à ce que l'on entend dire parfois, « églantine » ne désigne pas le fruit mais la fleur.

Au Québec, on a parfois désigné l'églantier sous le nom de « cébreur », par déformation du nom populaire anglais sweetbrier. Toutefois, le brier de sweetbrier serait, lui, une déformation du français « bruyère », arbuste que ce nom désigne, lequel nom, par parenté de forme, les anglophones ont aussi attribué au rosier sauvage. Ah! La fluidité des langues!

Et ça se mange?

Les baies de diverses variétés de rosier sauvage étaient consommées par de nombreuses peuplades amérindiennes sur tout le territoire où il pousse. Elles étaient considérées comme un excellent aliment de survie dans la mesure où elles restent accrochées au plant tout l'hiver. On en faisait une décoction et chez certaines peuplades, une bière. En été, on consommait également les pétales des fleurs. Les Pied-Noirs broyaient les baies et les mélangeaient avec du pemmican. En passant, saviez-vous que depuis 1819 - date de sa découverte par un marin et explorateur anglais - le pemmican est la nourriture de base de toutes les expéditions polaires à cause de sa très haute valeur nutritive, de son volume réduit et de son exceptionnelle conservation? Composé originellement de viande séchée, pulvérisée et mélangée à de la graisse, cet aliment traditionnel des Amérindiens de la Baie d'Hudson a connu quelques variantes modernes mais le principe de base reste exactement le même : pour l'essentiel, de la viande séchée et un corps gras, auxquels on ajoutera éventuellement de la poudre de légumes, de la poudre de céréales, quelques fruits séchés et du sucre.

Les Esquimaux de l'Alaska confectionnaient une sorte de pouding avec de la pulpe écrasée de cynorrhodons, de l'huile de phoque, de l'eau et du sucre. Ils ajoutaient également les baies à un plat composé de queues de saumon pré-mastiquées (pré-mastiquées? Seigneur! J'entends d'ici les protestations des inspecteurs des aliments!) et séchées. Aujourd'hui, elles sont plutôt préparées en sirop, confiture, gelée, marmelade et ketchup, seules ou mélangées à divers autres fruits. Les Tanainas les mélangent à de la graisse ou des oeufs de poisson, ou encore les battent avec un corps gras pour en faire une sorte de crème glacée. Dans certaines tribus, les feuilles étaient placées dans la fosse à cuisson afin d'aromatiser les plats que l'on cuisait dans la braise. On a également fait une décoction des feuilles et des jeunes rameaux.

Homo sapiens sapiens et sa conjointe ne sont pas les seuls à rechercher cette baie légèrement acidulée. Il semblerait, en effet, que les Ursus - sans distinction d'espèce ou de sexe - y voient un aliment de pré-hibernation de choix.

Les baies de toutes les variétés de rose - sauvages ou cultivées - se consomment mais, parmi les variétés sauvages, celle du Rosa rugosa est la plus grosse et, par conséquent, la plus facile à apprêter. Toutefois, lors de promenades, on est beaucoup plus susceptible de tomber sur Rosa blanda, que, malgré son surnom de « rose de cochon », il ne faudrait surtout pas sous-estimer. On devrait les cueillir de préférence après un premier gel, ce qui a pour effet de les attendrir. Il faut impérativement éviter de récolter les baies sur des plants que l'on soupçonne d'être traités aux produits chimiques.

Quelle que soit la recette employée, tenez compte des points suivants :

juste avant la cuisson, préparer les baies en coupant les deux extrémités avec des ciseaux;

comme les baies sont acides, il vaut mieux utiliser des ustensiles et casseroles en bois, acier inoxydable ou pyrex pour éviter qu'elles ne noircissent au contact d'un métal oxydable;

cuire rapidement en couvrant afin de limiter la perte de vitamine C;

filtrer à travers un fin tamis pour éliminer les graines et leurs poils, qui sont irritants.

On peut en faire de la bière, du vin, de la gelée ou des confitures (voir notre recette dans Documents associés). Les Suédois en font une soupe, qu'ils mangent chaude ou froide et qu'ils préparent en broyant les baies et en les faisant bouillir une dizaine de minutes. Passer, remettre sur le feu, amener à ébullition et épaissir avec 4 cuillères à soupe de fécule de pomme de terre ou de farine diluée dans 2 tasses d'eau froide.

Et ça soigne quoi?

Très riche en vitamine C - toutes proportions gardées, la baie serait 20 fois plus riche en cette vitamine que l'orange - on l'a employée pour combattre les infections, la grippe tout particulièrement. On raconte que durant la deuxième grande guerre, les Anglais et les Scandinaves étaient entièrement privés d'agrumes et qu'ils comptaient exclusivement sur la confiture de baies d'églantier comme source de vitamine C.

Probablement pour les mêmes raisons, le cynorrhodon a servi à soigner la lassitude et l'asthénie. On le prenait à raison de 2 cuillères à soupe de pulpe séchée et réduite en morceaux, que l'on faisait infuser dans un litre d'eau froide (ou 2 à 5 g par tasse d'eau), amenait à ébullition, filtrait et buvait. On l'a également employé comme astringent pour combattre la diarrhée, la dysenterie, la leucorrhée et les hémorragies.

En Chine, où les emplois médicinaux de la rose sont attestés depuis près de 30 siècles, les baies d'une variété locale sont employées contre les dysfonctions de l'appareil urinaire et, à cause de leur astringence, contre la diarrhée chronique.

Préparées en sirop, on les a beaucoup employées pour donner une saveur agréable à ces potions médicinales que, de tout temps, les enfants se sont attachés à recracher systématiquement, au mépris de tout bon sens. Les pilules de quinine, notamment, qui étaient extrêmement amères et qu'on enrobait d'une « confection de roses canines » préparée à raison d'une partie de pulpe pour deux parties de sucre que l'on triturait ensemble jusqu'à obtention d'une pâte uniforme.

Les « graines » et leurs poils sont réputés être diurétiques. Il faut s'assurer de bien passer la tisane avant de la prendre.

Une des meilleures manières de conserver aux baies toute leur richesse en vitamine C, c'est de préparer une purée crue. On prélève la chair en éliminant les graines et leurs poils et on la passe tout simplement au mélangeur. On peut ajouter cette purée aux céréales du matin ou à de la compote. Mais il faut la consommer dans les plus brefs délais car elle ne se conserve pas.

Les fleurs ont surtout servi en cosmétique. Grâce à leurs propriétés astringentes, elles sont censées resserrer les pores de la peau et en raffermir le grain. On les a également employées comme laxatif doux et comme cicatrisant dans les aphtes, les plaies fongueuses et l'inflammation des paupières.

Le « bédégar », une galle provoquée sur les feuilles de l'églantier par un insecte, était jadis employé comme vermifuge, diurétique et lithotriptique mais, plus tard, on s'en est servi exclusivement comme astringent.


Aunée

 Aunée

Son nom

Helenium viendrait de Hélène, par allusion à la légende qui veut que la plante soit née d'une larme d'Hélène, l'hellénique fille de Zeus et de Léda, dont l'enlèvement, affirme-t-on, provoqua la guerre de Troie. Mais, on le sait, rien n'est jamais simple en matière de terminologie botanique. Ainsi « aunée » viendrait de l'ancien français « eaune », emprunté au latin populaire elena, lequel est une modification (par influence du nom propre Helena) du latin Helenium, emprunté au grec helenion. « Inule », « aunée », de même que le nom anglais elecampane (contraction de Enula campana, autre nom latin qu'on a attribué à la plante dans le passé), tous ces mots renvoient au helenium latin ou au helenion grec. En plus d'avoir l'impression de tourner en rond, on se retrouve en pleine confusion étant donné qu'il existe une autre plante portant ce nom, soit l'Helenium autumnale, qui appartient à la même famille et dont on attribue également l'origine à la célèbre demi-déesse grecque. Et pour arranger les choses, les soeurs de la Providence indiquent que la plante a déjà porté un autre nom latin, Gorvisartia helenium, dont je n'ai trouvé nulle trace dans les manuels de botanique moderne.

Le nom vernaculaire d'« oeil de cheval » renvoie probablement au fait qu'on l'a longtemps utilisée pour soigner les chevaux, bien qu'il ne s'agissait pas de maladies oculaires, mais pulmonaires. Qu'elle puisse aussi s'appeler « Plante à escarres » et « panacée de Chiron », on comprend - chacun sait que Chiron était un centaure médecin, n'est-ce pas? -, mais le nom de « lionne »? S'agit-il d'une simple déformation phonétique? Mes sources restent coites à cet égard. Quant au sens d'« aromate germanique », on suppose qu'il relève d'un usage assez important de la plante en Allemagne.

Et ça se mange?

L'aunée produit un gros rhizome fortement aromatique qui se mange après l'avoir fait cuire dans plusieurs eaux, histoire d'atténuer un peu sa saveur. On peut le râper pour parfumer salades de fruits, gâteaux, desserts ou liqueurs. Où, on peut le couper en morceaux et le confire dans un sirop de sucre. Ainsi préparé, il est censé faciliter la digestion. Les belles fleurs jaunes peuvent être employées en garniture dans divers plats. Les jeunes feuilles encore tendres se mangent après avoir cuit dans l'eau. Mais puisque les fêtes s'en viennent, pourquoi ne pas renouer avec la tradition et préparer un fabuleux gâteau aux herbes et aux fruits confits? Voyez notre recette dans Documents associés.

Et ça soigne quoi?

Selon le docteur Jean Valnet, l'aunée est une des plantes les plus précieuses. Antiseptique calmant, asséchant des voies respiratoires, elle a servi à soigner tout ce qui s'appelle bronchite, toux, tuberculose pulmonaire, asthme bronchique, quoiqu'elle ne serait pas tellement efficace pour l'asthme ordinaire. Tonique, diurétique, diaphorétique, emménagogue, elle a également soigné les néphrites, l'anémie, la fatigue générale, les règles douloureuses ou l'absence de règles, les pertes blanches, les parasites intestinaux, la diarrhée, la goutte ainsi que, par voie externe, les dermatoses, les prurits, les ulcères, les escarres et la trachéite. Riche en inuline, un sucre non assimilable, elle serait utile aux diabétiques, tout comme, d'ailleurs, les autres plantes de la famille des composées qui en renferment. La chicorée sauvage, ou barbe-de-capucin, notamment.

- Au nez et à la barbe des capucins, vous dites?

- Pardon?

- Oui, la tisane, on la prend au nez et à la barbe des capucins?

- Ah! Ah! Vraiment très drôle!

- En passant, vous savez que l'équivalent latin de « capucin » était cappuccino?

- Oh! Joli! À cause du capuchon, je suppose?

- Du capuce, plus précisément, un capuchon taillé en pointe.

- Fascinant, mais on dérive pas mal, il me semble.

On prend l'aunée sous forme de décoction à raison de 10 à 20 g par litre d'eau; une tasse avant chaque repas. Ou sous forme de teinture à raison de 15 à 20 gouttes, quatre à cinq fois par jour. Séchée et réduite en poudre, la racine peut se prendre telle qu'elle à raison de 2 à 10 g dans un liquide quelconque, une tasse de bouillon de poulet, par exemple.

Si vous avez eu la bonne idée de faire sécher du millepertuis et du lierre terrestre en saison, vous pourrez préparer une potion destinée à soigner les bronchites et la toux qui risquent de se manifester durant l'hiver, en mélangeant les trois plantes à parts égales et en infusant le tout dix minutes à raison d'une cuillère à thé par tasse d'eau. Prenez trois tasses par jour, avant ou après les repas.

Pour soigner les maladies cutanées, particulièrement les prurits, on lave la partie atteinte avec une décoction préparée à raison de 30 g par litre d'eau.

En Chine, on se sert des fleurs de l'Inula japonica pour soigner l'asthme et la bronchite accompagnée d'un trop-plein de mucus, ainsi que les vomissements et le reflux acide.


Aubépine

 Aubépine

Son nom

Le nom générique viendrait du grec kratos, qui signifie « force », par allusion à la dureté du bois, lequel a beaucoup servi à fabriquer leviers, manches et poignées d'outils et autres articles du genre.

« Aubépine » vient du vieux français « aubespin », lequel était tiré du latin populaire alb-ispina, lui-même emprunté au latin classique spina alba, c'est-à-dire « épine blanche », par opposition à « épine noire », spina nigra, c'est-à-dire le prunellier, plante épineuse de la même famille, également employée en médecine.

On croit que « cenelle » vient du latin populaire acinella, de acinus « grain de raisin », « pépin ». Au Québec, « cenelle » est devenu « senelle », et l'aubépine (l'arbre) est devenue un « senellier ». On a également appelé le fruit « poire à cochons », probablement parce qu'il a servi de nourriture à ces suidés de l'ordre des artiodactyles.

- Bon, d'accord. « Suidés », du latin suis « porc », et « artiodactyles », du grec artios « pair » et daktulos « doigt », c'est-à-dire dont le nombre de doigts est pair.

Son rôle dans l'équilibre écologique

« Il semble que le grand développement du genre en Amérique soit le résultat immédiat de la rupture d'équilibre écologique amenée par le défrichement », écrit Jules Brunel dans la Flore laurentienne. En effet, l'aubépine était quasiment absente de l'Amérique avant l'arrivée des Blancs, car, pour s'épanouir, elle a besoin de beaucoup de lumière, ce que nos grandes forêts denses et hautes ne pouvaient lui offrir. Mais il semblerait que le genre connaisse une véritable explosion génétique sous nos climats, avec pour résultat que les 4/5 des espèces, se trouvent aujourd'hui de ce côté-ci de l'Atlantique.

Et ça se mange?

Les fleurs se mangent, mais elles dégagent très rapidement une odeur ammoniaquée qui rappelle par trop celle de l'urine. Il faut donc les consommer tout juste écloses. Les jeunes feuilles se mangent en salade. Les fruits sont comestibles, mais souvent insipides, leur pulpe étant généralement sèche et farineuse.

D'ailleurs, il semblerait que les Amérindiens n'en aient jamais fait grand cas, contrairement à d'autres plantes européennes que les premiers colons leur ont fait connaître. Ils les mangeaient principalement lorsqu'ils n'avaient pas d'autres baies à se mettre sous la dent. Pour contrebalancer la sécheresse de la pulpe, ils la mélangeaient à des aliments gras - oeufs ou laitance de saumon - ou à des corps gras - huile de saumon, graisse de poisson-chandelle, graisse de marmotte ou d'ours. Ou encore, ils pilaient les fruits et en confectionnaient de fines tablettes qu'ils faisaient sécher pour les manger plus tard, trempées dans de la soupe ou bouillies avec de la graisse de cerf et de la moelle. D'autres les ajoutaient à de la chair et des arêtes de saumon pilées et séchées. Les Iroquois les mangeaient soit crues, soit cuites dans une sauce ou dans les cendres, et les faisaient sécher pour l'hiver.

Selon le frère Marie-Victorin, les fruits de l'aubépine du lac Champlain (C. champlainensis, une espèce fréquente dans la région de Montréal) seraient les plus recherchés de tous, à cause de leur pulpe épaisse et succulente. Ceux de l'aubépine subsoyeuse (C. submollis) suivraient de très près.

La récolte des baies se fait de septembre à fin novembre, selon les régions et les variétés. Toutefois, il faut savoir que les fruits gagnent en saveur lorsqu'ils ont été exposés à quelques gelées. Malheureusement, ils sont souvent attaqués par les larves.

Au Texas et en Louisiane, on cultive une espèce locale, le C. opaca, pour ses baies juteuses que l'on récolte en avril et qu'on transforme en gelée ou en vin. La gelée est notamment employée pour glacer le canard ou l'oie, comme dans la recette que nous vous proposons dans Documents associés.

Et ça soigne quoi?

Étonnamment, les soeurs de la Providence ne font aucune mention de l'aubépine, qui a pourtant été très utilisée en médecine. Cela s'explique probablement parce que ses propriétés cardiotoniques - de loin les plus importantes - n'ont été véritablement reconnues qu'à la fin du XIXe siècle. En effet, les premières références à ses propriétés n'apparaissent dans les manuels de médecine qu'en 1898 (rappelons que l'ouvrage de Matière médicale des soeurs de la Providence dont je dispose a été publié en 1890). Popularisée par la médecine éclectique au début du XXe siècle, l'aubépine a fait l'objet d'une intense utilisation médicinale pendant les deux premières décennies de ce siècle avant d'être graduellement remplacée par des médicaments de synthèse, bêta-bloqueurs et antagonistes du calcium, notamment.

Ce sont les fleurs et les feuilles, et, à un moindre degré les baies, voire parfois l'écorce, qui ont été employées en médecine. Tonicardiaque, hypotenseur, antispasmodique, c'est aussi un hypnotique léger et un fébrifuge, ce qui en fait un bon remède dans les palpitations, les douleurs cardiaques, l'angine de poitrine, les spasmes vasculaires, la tachycardie, les arythmies, l'athérosclérose, l'hypertension, ainsi que les bouffées congestives, palpitations, irritabilité et insomnies de la ménopause.

Si elle a permis de soigner tous ces problèmes, ses indications modernes portent surtout sur les maladies coronariennes. De plus, elle serait particulièrement utile pour le suivi d'un infarctus cardiaque dans la mesure où elle pourrait permettre de prévenir des attaques ultérieures. Elle doit toutefois être prise à très long terme, ses effets ne s'accumulant que très lentement dans l'organisme. Par contre, elle a l'avantage de ne présenter aucun effet indésirable.

À cause de leur astringence, les fruits sont utiles contre la diarrhée et la dysenterie. On pense qu'ils pourraient également contribuer à dissoudre les calculs urinaires et biliaires. Leur astringence en ferait également un bon remède pour le traitement topique des rougeurs et de la couperose.

Les fleurs se récoltent au printemps, avec les feuilles, quoique certains affirment que les feuilles sont plus riches en principes actifs lorsqu'on les récolte en août. On fait sécher fleurs et feuilles sur une toile moustiquaire, à l'ombre. On en prépare une infusion à raison d'une cuillerée à café par tasse d'eau bouillante. On prend deux ou trois tasses par jour.

Les baies se récoltent à l'automne et peuvent être séchées comme les fleurs. La tisane se prépare à raison de 15 g par litre d'eau. On en prend deux ou trois tasses par jour. Pour l'usage externe, on fait bouillir 20 g de fleurs ou de baies dans un demi-litre d'eau. On peut se servir directement de la décoction pour laver le visage ou l'incorporer à une crème cosmétique.

Ce sont les espèces C. oxyacantha (nom moderne : C. laevigata), C. monogyna et, à un moindre degré, C. pentagyna, toutes d'origine européenne, qui ont fait l'objet d'études scientifiques. On croit toutefois que toutes les espèces pourraient exercer une activité thérapeutique dans la mesure où toutes renferment probablement les flavonoïdes actifs qu'on a isolés dans les espèces étudiées, quoique possiblement dans des proportions qui pourraient varier grandement selon les cas.


l'achillée millefeuille

  l'achillée millefeuille

L'achillée tire son nom d'Achille, qui aurait découvert et utilisé la plante pour guérir les blessures de ses soldats lors de la guerre de Troie. Encore que certains affirment qu'il s'agissait d'une tout autre plante. On l'a aussi appelée herbe à la coupure, herbe à la saignée, herbe-aux-charpentiers, herbe-aux-militaires, saigne-nez, tous des noms qui indiquent ses emplois traditionnels pour soigner les plaies et blessures de toutes sortes. Quant au nom de « sourcil de Vénus », son origine reste obscure. Peut-être fait-il référence au fait que la plante était censée aider les femmes à découvrir qui serait leur prince charmant? Nous y reviendrons plus loin. Au Québec, on l'a appelée « herbe à dinde » et « herbe au dindon » par allusion à l'emploi de la plante dans l'alimentation de cette volaille. Enfin, le nom de « millefeuille » lui vient de ce que sa feuille est très finement découpée et donne l'impression qu'il y en a mille là où il n'y en a en réalité qu'une seule.

Son rôle dans l'équilibre écologique

L'achillée est normalement très abondante dans les prairies naturelles et, jadis, les paysans lui reconnaissaient un effet fortifiant sur les animaux et le bétail. « Elle contient des substances volatiles qui stimulent leur appétit et renforcent leur organisme », écrivait en 1965 Marcello Piccioni dans son Dictionnaire des aliments pour les animaux (en 4 langues). Il affirmait en outre qu'elle donnait un parfum délicat à la viande des moutons qui la consommaient en fourrage. Fabuleuse époque où ce qui était mauvaise herbe pour le jardinier était aliment nutritif pour l'éleveur et où tout le monde y trouvait son compte! À petit budget, merci...

Et ça se mange?

On peut servir les feuilles en salade, mais en petites quantités seulement, car elles sont plutôt amères. Pour les apprêter cuites, on les fera d'abord bouillir vingt minutes dans l'eau pour leur enlever un peu de leur amertume et de leur arôme, puis on les égouttera et les sautera au beurre ou à l'huile.

Les feuilles ont, en outre, servi à aromatiser la bière. En Allemagne, on jetait ses graines dans les tonneaux de vin pour en assurer la conservation. La plante entière a parfois servi de condiment, en remplacement de la cannelle ou de la muscade.

Et ça soigne quoi?

Tonique, antispasmodique, hémostatique et, en usage externe, cicatrisante, elle a servi à soigner la fatigue générale, le lymphatisme, les spasmes des voies digestives et utérines, les névroses, les troubles de la circulation et de la cinquantaine (qui sont peut-être, en gros, les mêmes...) : la sédentarité, les varices, phlébites, hémorroïdes. En voie externe, on l'a utilisé contre les douleurs rhumatismales, les dermatoses, les ulcères de jambe, les crevasses du mamelon, les douleurs de la cellulite... On dit qu'au Moyen Âge, les chevaliers en transportaient un sachet dans leur « trousse de premiers soins ».

Mais c'est peut-être pour les femmes souffrant à la fois de règles douloureuses et de troubles digestifs durant les menstruations que l'achillée est la plus utile. Il est rare, en effet, qu'un médicament soigne à la fois les problèmes de la sphère génitale et ceux de la sphère digestive avec une telle efficacité. Prise sous la forme de teinture, elle calmera rapidement l'inflammation, de même que cette impression détestable que l'utérus et les intestins se livrent une concurrence féroce pour capter et retenir toute l'attention de leur propriétaire légitime.

C'est la plante entière que l'on récolte au moment de la floraison, laquelle a lieu de la mi-juin à l'automne, selon les régions et les caprices de dame nature. L'achillée à fleurs blanches ou à fleurs rouges serait plus active médicinalement que l'achillée à fleurs jaunes ou à fleurs orange.

L'infusion se prépare à raison de 30 grammes par litre d'eau. On en prendra 3 tasses par jour, entre les repas. La teinture - qu'on préparera avec 1 partie de plante pour 5 parties d'alcool à 90 % - se prend à raison de 20 à 30 gouttes, trois fois par jour. Pour les usages externes, on se sert de l'infusion concentrée (une poignée par litre d'eau) en lavages.

L'infusion de 30 grammes d'achillée à laquelle on aura ajouté une cuillerée à thé de miel et trois gouttes de sauce Tabasco est supposée avoir pour effet d'ouvrir les pores de la peau et de provoquer une transpiration profuse qui cassera un rhume ou une grippe. On recommande de bien se couvrir pour éviter de prendre froid.