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samedi 3 octobre 2020

Le pin

 Le pin

Ca se mange pour de vrai?

Si on vous demandait comme ça : « Tu les veux comment tes pousses de pin? », la réponse « Ben en salade, tiens! » ne vous viendrait peut-être pas spontanément. Et pourtant, c'est comme ça que les Iroquois apprêtaient les jeunes pousses du pin blanc (Pinus strobus). Du moins, ils les mangeaient crues. Les pousses de diverses autres variétés étaient également consommées crues par des groupes d'Amérindiens de la Colombie-Britannique.

En salade donc ou ajoutées à une potée de légumes en fin de cuisson, elles vous surprendront certainement. Et puis même s'il n'est fait nulle mention dans la tradition de leur cuisson, on pourrait essayer de les faire cuire légèrement à la vapeur, en les assaisonnant encore chaudes avec une vinaigrette moutardée. Ça ne peut pas être mauvais...

Du pin qu'on dit médicinal

On croit que les quelques marins de Jacques Cartier, qui n'étaient pas encore morts du scorbut lorsque leur bateau accosta en Gaspésie, furent sauvés par l'infusion des aiguilles d'une variété de pin que les Indiens Micmac leur apprirent à préparer.

Depuis toujours, les Européens récoltent les jeunes pousses d'une autre variété de pin, le Pinus sylvestris ou pin sylvestre, aujourd'hui planté un peu partout en Amérique du Nord. Ils en font une tisane qu'ils prennent traditionnellement pour soigner l'inflammation de la muqueuse des bronches ou, en inhalation, le rhume de cerveau. Ils en préparent également une lotion pour soigner les plaies rebelles et le rhumatisme.

C'est dans le bain que ça se passe le mieux

En Allemagne, la tradition des bains médicinaux est solidement établie. Vieille de plusieurs centaines d'années, elle s'est raffermie sous l'influence du médecin hygiéniste Kneipp, qui préconisait des bains pour à peu près tout et n'importe quoi. Parmi les diverses plantes employées, le pin jouissait d'une excellente réputation pour le traitement de diverses maladies nerveuses ainsi que des problèmes névralgiques et rhumatismaux.

Il existe, bien sûr, diverses préparations pour le bain à base d'huile essentielle. Peut-être sont-elles plus pratiques à utiliser que les jeunes pousses, mais elles sont infiniment moins pittoresques! De plus, elles ne vous offrent pas l'occasion d'une bonne balade au cœur d'une forêt ou d'un taillis de pins, à humer un air complètement saturé d'une puissante essence camphrée-citronnée. Est-ce que ce n'est pas tout aussi médicinal ça?

On les récolte où et comment?

Au Québec, le pin blanc n'est plus que l'ombre de lui-même. L'arbre gigantesque, au tour de taille impressionnant, dont les remarquables colonies caractérisaient la forêt mixte de la région laurentienne est devenu bateau, poutre, poutrelle, planche, tonneau. À cette surexploitation, s'est ajoutée une maladie qui a fait des ravages énormes dans les populations indigènes. Aux États-Unis, ce sont des milliers d'hectares qui ont ainsi disparu en l'espace de quelques décennies.

Mais on trouve tout de même du pin blanc ou encore du pin sylvestre en plusieurs endroits. Comme tous ceux de leur genre, ils poussent généralement en terrain sec et sablonneux. Ne les recherchez donc pas en bordure de rivières ou de lacs, mais plutôt sur les sommets rocheux. Ou encore, demandez au propriétaire d'une plantation s'il accepterait de vous laisser prélever quelques pousses.

Ces dernières se récoltent à l'extrémité des branches là où les aiguilles ne sont pas encore développées. Pour les salades, mettez de côté les pousses les plus tendres. Elles doivent casser sur une simple pression des doigts. Les moins tendres iront dans le bain. Si vous avez la chance de rencontrer un spécimen âgé (autour de 60 à 80 ans, paraît-il, encore que c'est pas évident de deviner l'âge d'un arbre), choisissez-le de préférence à tout autre car, d'après les Allemands, c'est à cette étape de la vie du pin que les pousses sont les plus intéressantes.

De retour à la maison, faites-les sécher sur une toile moustiquaire à l'abri de la lumière et de l'humidité. Conservez-les dans une boîte de carton, un sac de papier kraft ou un contenant de verre ou de métal.

Pour le bain, vous avez le choix entre mettre vos jeunes pousses - fraîches ou séchées - dans un sac de tissu que vous aurez spécialement cousu pour l'occasion et qui trempera avec vous dans l'eau du bain ou encore de préparer une infusion concentrée dans deux ou trois litres d'eau, laquelle infusion vous ajouterez à l'eau du bain. D'une manière ou de l'autre, il vous faudra environ 500 g de jeunes pousses. Après le bain, il est recommandé de s'étendre pendant une demi-heure, voire une heure, avant de reprendre ses activités habituelles.

Saviez-vous que?

Il n'y a pas si longtemps encore, on confectionnait avec les aiguilles de pin une laine (dite laine de bois, laine de forêt ou laine végétale) ainsi qu'une flanelle végétale (encore appelée ouate ou coton de pin) qui servaient à fabriquer des matelas.

À cause de leur nature acide, les aiguilles de pin constituent un excellent paillis pour les fraisiers qui les préfèrent nettement à la paille. Elles conviennent aussi aux plantes ornementales qui poussent en milieu acide (azalées, rhododendrons).


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