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lundi 12 octobre 2020

le sapin baumier

 le sapin baumier

Son nom

La langue offre des noms tous plus éloquents les uns que les autres lorsqu'il s'agit de désigner les diverses espèces de cet arbre : sapin magnifique (Abies magnifica), sapin grandissime (A. grandis), sapin gracieux (A. amabilis). Tout cela témoigne de l'amour, voire l'admiration que l'être humain lui porte depuis toujours et il n'est pas étonnant que ce soit lui que l'on ait choisi comme symbole de Noël. Quant au nom de notre principale espèce, le sapin baumier (A. balsamea), ça ne prend pas un doctorat pour comprendre qu'il fait référence à la puissante odeur que l'arbre dégage, plus particulièrement sa gomme-résine, qui a connu un temps son heure de gloire puisque sous le vocable de « baume du Canada », elle était vendue en bien des endroits du monde.

En France, où on utilise souvent le bois de sapin pour la fabrication de cercueils, l'expression « sentir le sapin » signifie qu'on n'en a plus pour longtemps à vivre. Pour les mêmes raisons, une toux qui sent le sapin, c'est très, mais très, mauvais signe. Au Québec, bien sûr, on sait tous qu'on n'a pas intérêt à se faire passer un sapin bien que l'origine de l'expression reste quelque peu obscur (quelqu'un pourrait-il éclairer ma lanterne à ce sujet?). En outre, l'argot français a créé l'expression « costume en sapin », dont l'équivalent anglais est wooden overcoat, mais je n'ai pas la moindre idée de ce que cela signifie. Y a-t-il un linguiste-historien dans la salle?

Et ça se mange?

Dans l'est comme dans l'ouest, les Amérindiens consommaient l'écorce intérieure de l'une ou l'autre des quatre espèces de sapin indigènes au Canada. On en faisait aussi une boisson. Les jeunes pousses (bout des branches) ont également servi à faire une boisson. On mâchait volontiers la gomme. En guise de friandise et de digestif, les Pieds-Noirs de l'Alberta mélangeaient de la moelle et du lard de gibier avec des fragments pulvérisés de cônes du sapin subalpin (A. lasiocarpa), fragments que les écureuils et les tamias avaient eu la bonne intelligence de laisser derrière eux. Ca, c'était de la récupération, monsieur!

Chez les Lapons et les Scandinaves, on consommait également l'écorce intérieure d'une espèce européenne, le sapin pectiné (A. pectinata). Pour la préparer, on la coupait parfois en lanières que l'on faisait bouillir dans l'eau, comme on le ferait pour des nouilles.

On a également mangé les jeunes pousses et les bourgeons en salade. En France, on produit très localement du miel de sapin.

Et ça soigne quoi?

La gomme de sapin

Lorsqu'on consulte les nombreux ouvrages de phytothérapie qui ont paru au cours des dernières décennies, on s'étonne de l'absence quasi totale du sapin dans la liste des plantes décrites, alors qu'il a constitué, au Québec du moins, un des remèdes les plus populaires. « La gomme de sapin est l'un des articles essentiels de la médecine populaire des Canadiens français qui l'emploient, avec raison d'ailleurs, comme antiscorbutique, comme antiseptique dans les blessures et en cataplasmes sur les brûlures », écrivait le Frère Marie-Victorin dans sa Flore Laurentienne. De cette gomme, on a tiré diverses préparations, notamment une térébenthine (attention, il ne s'agit pas de la térébenthine des quincailliers!), une huile de térébenthine et un goudron médicinaux, préparations ayant une activité assez semblable, mais dont la densité et la viscosité variaient, ce qui permettait d'élargir le champ d'intervention.

Considérée comme un excitant, un diurétique et, à doses élevées, un purgatif, la gomme a été employée en injections pour détruire les ascarides et pour combattre les coliques et la constipation opiniâtre. Par voie externe, on l'a employée en onguent ou en emplâtre, sur les coupures, les ulcères tardant à guérir, les parties affectées de rhumatisme et les douleurs de reins. Les femmes de la campagne s'en servaient en emplâtre contre les douleurs menstruelles ou toute autre douleur liée au système de reproduction féminin.

Pour soigner les rhumatismes chroniques, on employait aussi la térébenthine, sous forme de bain de vapeur. On affirmait en outre qu'elle préservait du choléra.

Avec l'huile de térébenthine, on préparait une solution à lavement, composée également de jaune d'œuf, de tisane d'orge et d'empois (qui ne servait pas qu'à empeser les chemises). Le lavement était destiné à traiter les affections des voies urinaires, l'aménorrhée, la constipation obstinée et l'accumulation des « vents » dans les intestins. Pour le traitement des affections des voies urinaires ainsi que de l'inflammation de la vessie, on se servait également de la gomme et de l'écorce.

Le baume du Canada entrait dans la composition de diverses autres préparations officinales, dont le « collodion flexible », composé de fulmicoton (de la nitrocellulose, proche parente de la dynamite...), éther, alcool et huile de ricin. Il s'agissait d'un pansement servant à préserver les parties malades du contact de l'air, favorisant ainsi la guérison. On l'employait pour soigner l'inflammation du sein, le rhumatisme articulaire aigu, les fissures et les gerçures du mamelon, des lèvres ou des mains, les engelures, les excoriations, les ulcères des jambes, l'impétigo facial, les croûtes de lait chez les enfants, ainsi que les brûlures au premier degré.

Il existait également une préparation dite « baume de genièvre » qui, malgré son nom, ne comprenait pas de genièvre, mais plutôt de la gomme de sapin, de l'huile d'olive, de la cire jaune, du santal rouge et du camphre, et qui était considérée comme un excellent cicatrisant, notamment contre les gerçures des lèvres et des mains. On disait même que c'était là un des meilleurs onguents pour toute espèce de plaies, même les gangréneuses. On se demande vraiment pourquoi on n'en trouve pas dans le commerce.

Tout comme les jeunes pousses du pin et de l'épinette, celles du sapin pectiné (A. pectinata) européen ont servi à des bains thérapeutiques, et on peut supposer que celles du sapin baumier apportent les mêmes effets bienfaisants. On s'en est également servi pour préparer un sirop aux vertus expectorantes (les bourgeons servaient aux mêmes fins). Dans les chaumières du Québec, on en faisait une tisane apéritive, dépurative, rafraîchissante et tonique.

On croit que les propriétés antiscorbutiques du sapin baumier ont été enseignées à Jacques Cartier par Donnacona, le chef des Hurons-Wandats de Stadakona (Québec). En effet, lorsque le Français aborda les côtes du Québec pour la première fois en 1534, les deux-tiers de ses hommes étaient morts du scorbut et ceux qui restaient n'en menaient vraiment pas large. En homme de compassion, Donnacona prépara une infusion de sapinage pour les marins, leur indiquant comment la préparer à leur tour afin qu'ils puissent poursuivre leur traitement aussi longtemps que nécessaire. C'est ce qui les sauva. En passant, d'aucuns affirment qu'il s'agissait d'une autre espèce de sapin, voire de pin, mais c'est là une discussion quelque peu oiseuse puisque, dans les faits, tous les conifères sont riches à la fois en vitamine C et en bioflavonoïdes, substances qui favorisent grandement l'absorption de cette vitamine (appelée aussi « acide ascorbique », c'est-à-dire « qui combat le scorbut »).

Quoi qu'il en soit, lors de son deuxième voyage en 1536, Jacques-Cartier s'empressa de faire prisonniers Donnacona et neuf autres Wandats pour les emmener ensuite en France. Donnacona y mourut sans avoir revu les siens...

La gomme a servi à fabriquer des pastilles à la fois agréables au goût et expectorantes. On peut toutefois les confectionner avec une infusion d'aiguilles 


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